Chat Internet sur Yahoo! Music – 26/10/2001

Le 26 Octobre 2001, Michael Jackson donnait une interview à travers un chat audio sur Internet. C’est Anthony DeCurtis, critique musical renommé du magazine Rolling Stone, qui s’est chargé de transmettre toutes les questions des fans du Roi de la Pop à leur idole. Le chat était produit par GetMusic.com, représentant de la communauté pop. Les sociétés internationales Sony Music et Yahoo! étaient également associées à cette rencontre.

Jusqu’au moment où j’ai réellement entendu sa voix à l’autre bout du fil, honnêtement j’avais refusé de croire que j’allais parler à Michael Jackson. Ayant accordé tellement peu d’interviews ces vingt dernières années, je me disais que celle-ci finirait par être annulée à la dernière minute, d’une façon ou d’une autre. Mais il était bien là, il appelait « d’un lieu tenu secret dans le New Jersey » – comme on dit de nos jours. On était d’accord pour que le chat aborde surtout la sortie de son nouvel album « Invincible », et il avait l’air très enthousiaste à l’idée que ses fans puissent lui poser leurs questions des quatre coins du monde. Il a insisté sur le fait qu’il avait travaillé vraiment très dur afin de créer le son qu’il voulait donner à l’album, ainsi que les sentiments qu’il essayait d’y exprimer. J’étais très intrigué d’apprendre à quel point il avait été assiégé [par la presse et les média], d’où les titres « Invincible » et « Unbreakable », et qu’il fasse preuve d’autant de détermination pour ne pas craquer face à cette pression. Le moment le plus touchant fut lorsqu’il a décrit ce terrible manque qu’il ressentait, celui d’avoir le plaisir de vivre ce que tout le monde considèrerait comme une vie normale, aller au cinéma ou à une soirée par exemple, sans avoir besoin d’être Michael Jackson. Etonnamment – enfin pour moi en tous cas – il m’a semblé très à l’aise et, malgré (ou peut-être à cause de) la distance due au fait de parler au téléphone, étrangement intime. Anthony DeCurtis

Anthony DeCurtis : Michael, c’est un plaisir de vous parler aujourd’hui !

Michael Jackson : Tout le plaisir est pour moi.

AD : Bien, parlez-nous un peu du nouvel album. C’est votre premier en six ans. Etes-vous toujours aussi enthousiaste quand vous sortez quelque chose de votre sac ? Vous avez accompli tant de choses à travers les années… Est-ce que vous vous demandez toujours ce que les gens vont en penser, est-ce que vous anticipez de la même manière ?

MJ : D’une certaine façon, je compare cela au processus de la naissance. Vous savez, c’est comme avoir des enfants et devoir les élever, les ouvrir au monde. Et puis une fois que c’est fait ils doivent se débrouiller tout seuls. Donc c’est très excitant ! On ne s’y habitue jamais, jamais. C’est une expérience incroyable. Parce qu’on remet ça aux mains de Dieu, comme quand on a un enfant.

AD : Absolument. Quelle est votre chanson préférée sur le nouvel album ?

MJ : Ma chanson préférée sur l’album… Je peux en choisir deux ?

AD : Je pense que oui… Vous pouvez faire ce que vous voulez !

MJ : Je pense que ça serait… « Unbreakable »… J’en prends trois : « Unbreakable », « Speechless » et « The Lost Children ».

AD : Parlez-nous un peu de ces chansons, de comment s’est passé l’enregistrement… De votre travail avec des invités spéciaux, des nouveaux producteurs, de comment vous avez écrit [les chansons]… Donnez-nous-en un petit avant-goût.

MJ : Eh bien, le processus de l’écriture est quelque chose de très difficile à expliquer car c’est très spirituel. C’est dans les mains de Dieu, comme si ça avait déjà été écrit auparavant. Franchement, c’est vrai. C’est comme si ça avait été écrit avant votre naissance et que la chanson venait à vous. Parce que ça vous arrive directement dans les bras, tout fait. On n’a pas vraiment à y réfléchir en fait. Et je culpabilise parfois de devoir mettre mon nom sur les chansons que j’ai écrites et composées, celles dont j’ai écrit les paroles, la mélodie et les arrangements, mais qui sont quand même le travail de Dieu.

AD : Comment décririez-vous le son d' »Invincible » ? Avez-vous incorporé de nouveaux genres musicaux dans l’album ?

MJ : Eh bien, techniquement nous essayons toujours de trouver un son frais et détaillé, le meilleur son, les meilleurs techniciens, les meilleurs ingénieurs disponibles. Et bien entendu, j’essaie de faire de l’album un pot pourri de mélodies magnifiques de tous les styles – car je n’aime pas coller d’étiquette à une chanson ou la classer dans un style précis. Je pense qu’un très bon artiste devrait être capable de créer n’importe quel style, n’importe quelle forme… Que ce soit du rock, de la pop, du folk, du gospel, du spiritual, ou tout simplement de la bonne musique que tout le monde peut chanter, d’un fermier irlandais à une dame qui nettoie les toilettes à Harlem. Si on arrive déjà ne serait-ce qu’à siffloter ou fredonner [la mélodie], c’est ça le principal.

AD : Est-ce que vous vous tenez au courant de la musique actuelle en écoutant les disques d’autres artistes ou la radio ? Ou bien lorsque vous travaillez, est-ce que vous préférez plutôt vous concentrer calmement sur ce que vous faites ?

MJ : En fait je suis toujours au courant de tout ce qui se passe à la radio, dans les boites de nuit, je sais ce que les gens écoutent. Même si les gens pensent que je vis à Neverland – mentalement, je suis tout le temps au pays imaginaire [rires] – je suis toujours au courant. Je sais toujours ce qui se passe dans le monde de la musique, tout le temps. Pas uniquement en Amérique, mais partout, dans le monde entier. Mais quand je travaille, je ne pense pas être influencé par beaucoup de musique contemporaine. Je pense que je crée ce que j’ai sur le cœur, quelque chose de très original en fait. J’essaie d’être aussi original que possible. Je ne me dis pas : « Bon OK, je vais faire une bonne chanson R&B, ou pop. » Je veux juste faire une bonne chanson.

AD : Vous laissez la chanson se former toute seule, quoi…

MJ : Ouais, c’est ça.

AD : Vous êtes-vous amusé sur le tournage du clip « You rock my world » ?

MJ : Ouais, on s’est vraiment bien éclaté. On est resté debout toute la nuit à travailler très dur [rires]. C’était bien d’entendre la musique diffusée sur le plateau avec de très grosses enceintes. C’est un de mes trucs préférés : écouter la musique vraiment très fort. Car j’adore mettre la musique à fond. Je veux dire, si vous écoutez ça sur Internet ou avec de plus petites enceintes, ça n’a pas la même puissance ; voilà pourquoi vous devez l’acheter ! Vous devez acheter ce CD pour entendre toute sa puissance. La différence est énorme, c’est incomparable ! Alors acheter le CD c’est ce qu’il y a de mieux à faire. Il n’y a pas de comparaison. On n’entend pas tout le son si on l’écoute sur un équipement audio plus réduit.

AD : Donc quand vous êtes sur le plateau, vous pouvez monter le son aussi fort que vous voulez ?

MJ : Aussi fort que je veux.

AD : [Rires] Comptez-vous sortir « Ghosts » en DVD ?

MJ : Oui, ça sortira en DVD aux USA en intégralité, avec des extraits du making-of inclus. Ça a été l’une des choses que j’ai préféré faire de ma vie, car j’avais depuis longtemps le rêve de faire quelque chose d’effrayant mais de comique aussi. Je voulais réunir tous ces éléments qui font que quelque chose est amusant. Mon but n’est pas de faire peur aux gens à tel point qu’ils angoissent avant d’aller au lit. Je veux qu’il y ait un peu d’humour aussi, mais un humour qui laisse aussi place à de la tristesse. Mais sinon oui, c’est cool. Ces fantômes ne faisaient pas vraiment peur, ils étaient drôles ! Ils marchaient au plafond [rires], ils faisaient rire les enfants… C’était marrant ! Vous savez, on ne veut pas terrifier les gens. Mais on a donné à ce gros bonhomme, ce maire, ce qu’il méritait pour avoir pénétré chez moi, dans une propriété privée, en me jugeant. Vous voyez ?

AD : Tout à fait. Pourquoi avez-vous appelé l’album « Invincible » ?

MJ : Eh bien, je crois qu’Invincible c’était le nom d’un des titres de l’album. Et, je ne voudrais pas me vanter mais le Livre Guinness des Records m’a une nouvelle fois nommé comme étant l’artiste ayant la carrière la plus longue – depuis que j’étais tout gosse jusqu’à aujourd’hui – et faisant toujours des tubes et des titres classés Numéro 1. Je suis si fier et honoré d’avoir été choisi par le Ciel – ou quoi que cela puisse être – pour être invincible et continuer à avancer et à exister, pour servir les gens à l’aide de divertissements formidables.

AD : Il y a aujourd’hui une chose dans l’industrie musicale qui fait que quand un artiste quitte le devant de la scène pendant trop longtemps, son public peut aller voir ailleurs. Aviez-vous peur de cela, de prendre du temps pour travailler sur « Invincible », ou êtes-vous convaincu que vos fans seront là et plus fidèles que jamais ?

MJ : Vous savez, vous me posez cette question, mais elle ne m’a jamais inquiété, je n’y ai d’ailleurs jamais pensé. Parce que j’ai toujours su que si une chanson est vraiment bonne ou si un film est vraiment bon, alors les gens veulent l’entendre ou le voir ! Peu importe que l’on se soit fait discret pendant une certaine période ou quoi… Vous savez, quand quelque chose est vraiment bien les gens ne peuvent pas le nier. Si on fait du bon boulot les gens veulent entendre ou veulent voir [ce qu’on a à proposer] ! Alors honnêtement ça ne fait rien, rien du tout. Du moment que l’on innove, qu’on est un pionnier, c’est le principal. Il faut donner aux gens ce qu’ils veulent entendre.

AD : De quelle chanson pensez-vous vous rapprocher le plus ?

MJ : Mmm… « Unbreakable »…

AD : Parlez-nous de ce titre, vous l’avez mentionnée plusieurs fois déjà, je suis curieux maintenant…

MJ : C’est parce que je suis certainement l’une des seules personnes dans le show-business à avoir connu les moindres facettes de tant de choses différentes. J’ai connu l’enfer mais j’y ai survécu. C’est vrai. J’arrive toujours à faire mon travail et personne ne peut m’en empêcher. Personne ne peut m’arrêter, quoi qu’il arrive. J’arrêterai quand je serai prêt. Et tout ce que je dis, c’est que je continuerai d’avancer, quoi qu’il arrive.

AD : Comptez-vous faire d’autres courts métrages pour les chansons très rapides d' »Invincible » , telles que « 2000 Watts », « Heartbreaker », « Unbreakable » et « Invincible » ?

MJ : Absolument. Et elle a dit – enfin la personne qui a dit ça a dit – le mot juste en disant court métrage. C’est ce qu’on essaie d’en faire, des courts métrages : avec le début, le développement et la fin d’une histoire. Tout ça pour faire de ce médium quelque chose de totalement inédit. Mais oui, absolument. On a toute une pléiade – je dirais même une encyclopédie – de court-métrages extraits de l’album à faire. Je suis très impatient de faire « Threatened » ! Ce sera un genre de clip à la film d’horreur avec Rod Sterling du « Twilight Zone ».

AD : Enorme !

MJ : Je vous jure, j’ai vraiment hâte de le faire celui-là !

AD : Une question d’un fan du nom de « Napoléon III » – il s’appelle George en réalité – qui dit que « C’est votre album le plus cohésif et impressionnant depuis ‘Thriller’ ou encore ‘Off the Wall’. Quels ont été quelques uns de vos meilleurs moments de l’enregistrement de cet album ? »

MJ : Mes meilleurs moments… De tous mes albums, je dirais que celui-ci a été le plus coriace à faire, parce que j’ai été plus sévère avec moi-même. J’ai écrit tellement de chansons, je n’ose pas en dire le nombre…

AD : [Rires]

MJ : Tout ça rien que pour en arriver aux… [il demande à quelqu’un] combien y en a là-dessus ? Seize ? Rien que pour en arriver aux seize que j’estime acceptables. Et puis il faut dire que pour mes précédents albums je n’avais pas encore d’enfants. Donc là j’ai souvent été malade, j’ai attrapé beaucoup de rhumes – parce que mes enfants ont souvent des rhumes.

AD : Oui exact, ce sont de mini-incubateurs de virus !

MJ : Alors on doit arrêter, recommencer, on arrête, on recommence, et c’est ça qui est difficile ! Mais je me suis vraiment bien amusé.

AD : Mais quand vous vous décrivez comme étant dur avec vous-même pendant l’enregistrement, comment ça se traduit ? Par exemple quand vous pensez que quelque chose n’est pas exactement comme ça devrait être, ou que vous pourriez l’améliorer, ou que vous aimeriez en faire quelque chose de différent… Comment ça se passe ?

MJ : Si je vous disais la vérité, je ne sais pas si les fans m’aimeraient encore !

AD : [Rires]

MJ : Parce que j’ai eu des musiciens qui se mettent vraiment en colère contre moi parce que je leur fais faire la même chose plusieurs centaines de fois, voire mille fois – littéralement – jusqu’à ce que ce soit comme je veux. Mais ensuite, ils me passent un coup de fil pour s’excuser et ils me disent : « Tu avais absolument raison  : je n’ai jamais joué aussi bien, je n’ai jamais fait un aussi bon travail, je me suis surpassé. » C’est ce qu’ils me diront dans ces cas-là. Et moi je leur dis : « C’est comme ça que ça devrait être, parce que tu t’es immortalisé, ce que tu as fait est là pour l’éternité. Tu as capturé le temps. » C’est comme le travail de Michel-Ange, comme la chapelle Sixtine, ça sera là pour toujours. Et tout devrait être comme cela, vous savez ?

AD : C’est un peu comme essayer d’en faire le meilleur standard possible.

MJ : Absolument !

AD : Aura-t-on des surprises sur le nouvel album ?

MJ : Des surprises… Alors là…

AD : [Rires]

MJ : Je crois qu’il est comme il est. Vous pouvez considérer qu’il contient des surprises si vous voulez, mais c’est tout ce que je peux en dire. Peut-être qu’on sortira des CDs single surprises à un moment, des choses comme ça, ouais. Ca viendra mais pas tout de suite.

AD : Très bien. Je voulais vous poser une question vous concernant en tant qu’homme de scène. Récemment vous avez fait des concerts au Madison Square Garden et un concert de charité au stade RFK. Votre talent scénique a toujours fait partie intégrante de votre marque de fabrique, c’est ce qui vous distingue beaucoup des autres artistes. J’aimerais que vous parliez un peu de ce que vous avez ressenti d’être devant un public à nouveau.

MJ : C’est difficile à expliquer. C’était plutôt palpitant de sentir la présence du public et de le voir, qu’il m’ait accueilli aussi chaleureusement. C’est un sentiment incroyable, je vous assure. Le public est là pour vous soutenir, vous montrer son amour, entendre ses chansons préférées. Et vous vous êtes là, debout, et il vous procure tant d’adulation, d’amour et d’hystérie. L’atmosphère est pleine d’amour. C’est merveilleux, c’est très émouvant. Ça me donne les larmes aux yeux. C’est magnifique.

AD : Dans votre livre, vous dites que c’est lorsque vous êtes sur scène que vous vous sentez le plus en vie, que ce sont ces moments-là qui vous transportent le plus.

MJ : C’est vrai. C’est de ne pas être sur scène qui m’est difficile. Ecrire de la musique ou de la poésie, être sur scène, regarder des dessins animés sont les choses que je préfère par-dessus tout. C’est ce qui me rend vivant, ce qui m’anime. J’adore ça. C’est ce qui m’inspire pour faire mon travail.

AD : Excellent. Nous avons une question d’une personne qui s’est nommée « The best dancer in the world » [« Le meilleur danseur au monde »]… Pourtant on vous a déjà au téléphone, on va peut-être devoir faire un concoursEn tous cas il dit que michaeljackson.com a annoncé que Jay-Z serait sur le nouvel album avec vous. C’est vrai ?

MJ : Non. Mais nous envisageons de faire quelque chose ensemble à l’avenir.

AD : Vous aimez Jay-Z en tant qu’artiste ? En tant que personne ? Vous avez passé du temps avec lui ? Que pensez-vous de lui ?

MJ : Je le trouve excellent. Il a un sens du rythme et du contre-rythme incroyable et c’est l’un des nouveaux artistes contemporains que les jeunes adorent. Il est vraiment, vraiment génial.

AD : Voulez-vous faire une tournée, et ferez-vous une tournée mondiale ou européenne ?

MJ : On n’y a pas vraiment réfléchi pour l’instant. Mais je ne peux pas dire, ça n’est pas prévu. On se concentre sur pas mal de choses en ce moment. Mais je ne peux pas vraiment vous dire.

AD : D’accord. Je voulais vous demander…

MJ : Vous savez quoi, dans un futur proche, je suis sûr qu’il y aura quelque chose. Bientôt.

AD : Les gens doivent rester à l’affût d’infos là-dessus alors.

MJ : Oui.

AD : Envisagez-vous de sortir des chansons d' »Invincible » en espagnol ou dans des langues autres que l’anglais ?

MJ : Eh bien jusqu’ici on n’a rien fait de tel, mais oui ce serait génial. On n’a pas exclu cette idée en tous cas. Le marché est très vaste, donc c’est tout à fait possible.

AD : En particulier pour quelqu’un comme vous qui êtes très connu dans le monde entier. Vous savez, pas mal d’artistes n’ont du succès qu’en Angleterre ou aux Etats-Unis, mais votre notoriété est internationale.

MJ : Merci.

AD : Un truc qui a fait un carton cette année a été la reprise qu’Alien Ant Farm ont faite de « Smooth Criminal ». Je voulais savoir si vous y aviez fait attention et si vous aviez aimé. Qu’en avez-vous pensé ?

MJ : Je l’ai vu [le clip] et j’en suis tombé amoureux !

AD : Excellent !

MJ : J’ai adoré. Je me suis dit : « Il faut que je fasse sortir ça ! ». Ils voulaient mon autorisation, alors je l’ai visionné, j’ai accepté et je leur ai dit de foncer.

AD : Fantastique. Ça doit être intéressant en tant qu’auteur de voir d’autres gens chanter vos chansons et en créer une interprétation différente. Qu’est-ce que cela vous fait ?

MJ : C’est un grand compliment. On se sent vraiment digne après cela, ça montre aussi que ma musique touche toutes les générations. En plus la plupart des gens ont l’air d’aimer [cette reprise] et cela me rend très heureux.

AD : Avec quels autres artistes avez-vous collaboré sur « Invincible » ?

MJ : Avec quels autres artistes ai-je collaboré sur « Invincible »… Voyons voir [il demande derrière lui], qui il y avait ?

AD : Y a-t-il des invités spéciaux ?

MJ : [Il demande toujours] Qui ça ? Ah oui, Carlos Santana.

AD : Fabuleux.

MJ : Nous avons fait un espèce de duo ensemble. Lui est à la guitare et moi je chante. C’est une chanson que nous avons écrite, elle est vraiment très belle.

AD : Le connaissiez-vous déjà ou veniez-vous tout juste de le rencontrer ?

MJ : Je l’avais déjà rencontré, mais nous avons beaucoup parlé au téléphone récemment. Parce qu’après avoir gagné son Grammy Award, il a dit à la presse qu’il voulait me rencontrer et qu’il était prêt à travailler avec moi. Alors tout le monde me l’a dit et donc je l’ai appelé, et il m’a confié que [de travailler avec moi] serait un rêve pour lui. Et il est vraiment très sympa ; il est si gentil et spirituel. Je l’ai trouvé vraiment humble, alors je me suis dit : « Il faut qu’on réussisse à faire quelque chose ensemble ».

AD : Donc vous avez écrit une chanson ensemble ?

MJ : Eh bien, il y a une chanson que moi-même et deux autres personnes avons écrite, et il y a participé. Et umm [rires]… « Whatever Happens ».

AD : Ah très bien ! Etes-vous un fan de Chris Tucker ? Il est dans votre dernier clip…

MJ : Je suis un immense fan de Chris Tucker, il me fait tellement rire ! J’ai vu tous ses films, et c’est tout simplement un type marrant ! Et j’aime les gens qui peuvent vous faire rire sans passer par la vulgarité ou utiliser de gros mots. Je veux dire, son humour est tous publics – même pour les enfants – et dépasse les frontières. C’est vraiment un mec marrant !

AD : [Rires] Absolument. Combien de temps mettez-vous à produire une chanson, à partir du concept initial jusqu’à l’enregistrement et le mixage finals ?

MJ : Eh bien [rires]…

AD : [Rires] Je suppose que ça dépend…

MJ : Ouais, ça dépend en effet. Et puis dans mon cas c’est différent des autres artistes, parce que je peux très bien faire plusieurs chansons en entier – par exemple cinq, six, sept, huit ou dix titres – puis je peux aussi bien les jeter et tout recommencer. Donc [rires] j’ai du mal à répondre à ce genre de question.

AD : Si on prenait une chanson de l’album en particulier, prenons « Invincible », combien de temps s’est écoulé entre le jour où vous avez eu la toute première idée pour cette chanson et, mettons, le jour où vous vous êtes dit « Vous savez quoi ? Ca y est, on y est, c’est exactement ce que je voulais. » ? Est-ce que vous vous en souvenez ?

MJ : Pour la chanson « Invincible » ?

AD : Oui.

MJ : Oui, oui, je me rappelle avoir demandé aux gars [les musiciens] de retourner en studio pour créer des choses plus originales. On ne – on a une façon de travailler bien à nous – on n’intègre pas tellement de sons de synthés pré-programmés sur l’album. Vous voyez… des sons qui sont déjà dans la machine, quoi. Nous on crée nos propres sons. On tape sur des objets…

AD : [Rires]

MJ : Donc en fait personne ne peut copier ce qu’on fait, parce qu’on fait tout de nos mains ! On découvre des choses, on crée des choses. Et c’est ce qui m’importe le plus : être un pionnier, innover.

AD : Absolument. Qu’est-ce qui vous a inspiré « Speechless » ?

MJ : Pour « Speechless » j’ai été inspiré par… En fait je passe beaucoup de temps en forêt. J’aime aller dans la forêt et j’aime grimper aux arbres. C’est ce que je préfère, grimper aux arbres et aller jusqu’en haut, puis regarder en bas, accroché aux branches. A chaque fois que je fais cela, ça me donne de l’inspiration pour ma musique. Il y avaient ces deux enfants adorables, une fille et un garçon, ils étaient tellement innocents. [Les enfants] sont la forme originelle de l’innocence. Et simplement le fait d’être en leur présence m’a rendu sans voix, car j’avais l’impression de regarder le visage de Dieu en les voyant. Ils m’ont inspiré la chanson « Speechless ».

AD : Eh bien, cette réponse peut avoir un rapport avec la prochaine question : où cherchez-vous l’inspiration pour écrire vos chansons ? Est-ce qu’elle vous vient d’endroits différents ?

MJ : Les meilleures chansons s’écrivent toutes seules. On ne les réclame pas, elles vous arrivent comme ça. Puis il y a ces chansons que l’on cultive en soi, en quelque sorte. On plante une graine, on laisse son inconscient suivre son cours, puis avec le temps on espère que quelque chose va venir, et en général ça vient. Je ne crois pas au concept de « l’angoisse de la page blanche », c’est une mauvaise expression. Ce n’est qu’un prétexte, ça n’existe pas. C’est comme pour n’importe quel peintre ou sculpteur, ils font leurs meilleurs travaux quand ils ont autour de 60 ou 70 ans. Fred Astaire dansait mieux quand il avait environ 70 ans. Michel-Ange a sculpté jusque dans ses 60 ou 70 ans, et son travail était très bon et très ingénieux. Mais dans le monde de la musique, certains grands artistes perdent toute leur inspiration car ils s’auto-détruisent très jeunes avec tous ces trucs immondes qu’ils boivent, en avalant des comprimés et d’autres choses, et ça c’est très mauvais.

AD : Exact.

MJ : C’est pas bon du tout. Je ne veux blesser personne en disant cela, mais on devrait se préoccuper de notre corps un peu plus.

AD : Je pense que beaucoup de gens se rendent compte qu’ils se sont fait du mal. On en a beaucoup parlé ces dernières années.

MJ : Ouais.

AD : Allan demande si tu penses que Rodney Jerkins et vous-même avez créé un son nouveau pour 2001.

MJ : Pour la chanson « 2000 Watts » ?

AD : [Rires] Pensez-vous que vous et Rodney Jerkins – le producteur donc – avez créé un son nouveau pour 2001 ?

MJ : 2001 ?

AD : Oui.

MJ : Oh… Euh, ça serait bien, oui !

AD : [Rires] C’était comment de travailler avec Rodney Jerkins ? Comment vous êtes-vous rencontrés, comment s’est passé votre collaboration ?

MJ : En fait il disait à tout le monde à Hollywood et dans l’industrie du disque que son rêve était de travailler avec moi. Mais à vraiment tout le monde !

AD : [Rires]

MJ : Et un jour où j’étais chez Carole Bayer Sager – c’est une grande parolière, elle a reçu plusieurs Oscars pour son travail… Elle m’a dit : « Il y a un type avec qui tu devrais travailler. Il est venu me supplier de te rencontrer. Pourquoi tu ne l’appellerais pas pour lui dire bonjour ? ». Alors il est venu ce jour-là et il m’a dit : « S’il vous plaît, mon rêve est de travailler avec vous. Vous voulez bien m’accorder deux semaines et je verrai ce que je peux vous proposer ? » Et donc on a fini par travailler ensemble.

AD : Qu’avez-vous pensé de lui ? Qu’a-t-il apporté [à l’album] ? Quelle a été sa contribution à votre avis ?

MJ : Sa contribution… Il adore créer de la même façon que moi j’aime créer. Mais j’ai dû pousser Rodney… J’ai dû le pousser, pousser, pousser, pousser [rires] à créer et à innover plus. C’est un vrai musicien, il est très dévoué et très loyal. Il est persévérant. Je ne pense pas avoir connu quelqu’un d’aussi persévérant que lui. Parce qu’on peut le pousser encore et toujours et il ne se fâchera même pas ! Oui, je pense que c’est un type génial, vraiment génial.

AD : C’est un grand compliment.

MJ : Et Teddy Riley est tout simplement incroyable ! C’est un innovateur lui aussi. J’adore travailler avec lui.

AD : Vous aviez travaillé ensemble par le passé, bien sûr.

MJ : Ouais. En tant qu’être humain, c’est l’une des personnes que je préfère au monde. C’est tout simplement un homme adorable et super gentil. Et puis Rodney est très drôle. On rit toute la journée quand on est avec lui.

AD : Génial !

MJ : Il monte la musique dans le studio et il se met à danser dans toute la pièce ! Il est marrant !

AD : Avez-vous inventé de nouveaux pas de danse pendant que vous faisiez l’album ?

MJ : Pour la première fois en travaillant sur un de mes albums, j’ai fait une pause pour la danse. Parce que j’étais tellement absorbé et engoué pour mon travail. J’ai fait quelque chose de très inhabituel. Mais une fois que la musique commence, là évidemment je me mets à danser. Mais oui, maintenant ça commence à prendre forme, effectivement. Et là je suis en train de faire de nouveaux pas qui collent bien à la musique. Vous verrez ça bientôt, dans mes nouveaux clips. Vous verrez vraiment plein de nouvelles choses et de nouveaux mouvements jamais vus auparavant. On va explorer un territoire encore inconnu de la danse. Parce que tous les pas de danse hip-hop actuels commencent à ressembler à des séances de gym, et ça devient énervant.

AD : [Rires] Vous avez mentionné tous ceux qui voulaient travailler avec vous. Avec qui voudriez-vous faire un duo, que ce soit un artiste ancien ou un artiste contemporain ?

MJ : Si c’était un ancien artiste ce serait quelqu’un comme… Je dirais Sarah Vaughan ou bien Nat King Cole.

AD : Fantastique !

MJ : Pour un artiste contemporain, je crois que Whitney Houston est superbe et Barbra Streisand a une voix magnifique. Des artistes comme ça, qui sont vraiment merveilleux.

AD : Que pensez-vous de ces tout nouveaux jeunes artistes, tels que Britney Spears ou Christina Aguilera ? Toutes ces jeunes popstars qui sont bien sûr devenues très populaires. Britney Spears a participé à votre concert du Madison Square Garden… Que pensez-vous d’elle ?

MJ : Je crois que cette nouvelle génération d’artistes fait du très bon boulot. Et ce qui m’a le plus impressionné chez ces artistes, comme Spears ou Christina, c’est leur détermination !

AD : Absolument.

MJ : On m’a parlé de leur manière de travailler. Ils peuvent travailler sur un pas de danse pendant des mois jusqu’à ce que ce soit parfait ! Ils sont vraiment déterminés. J’ai rencontré Britney plusieurs fois et elle était vraiment adorable et humble. Elle est venue dans ma chambre. On a parlé tranquillement pendant quelques heures, et elle était comme une poupée Barbie. Elle était très douce et très gentille.

AD : J’imagine que quelqu’un comme vous peut lui apprendre pas mal de choses, étant donné que vous étiez déjà une star à un jeune âge… Je ne pense pas que les gens comprennent forcément à quel point votre réalité est étrange, qu’en plus de la célébrité et toute l’excitation qui va avec, le fait d’être toujours le centre d’attention alors qu’on n’est qu’un enfant peut parfois être un peu effrayant. Est-ce que c’est ce que vous avez ressenti ?

MJ : Oui, parce que où que j’aille je me déguise. Mais en ce moment je ne peux pas, vous savez, à cause de tout ce qui ce passe dans le monde en ce moment [ndt : depuis les attaques du 11 septembre 2001, MJ ne peut plus se déguiser en cheik arabe comme il le faisait auparavant]. Alors je ne peux pas porter de déguisement. Mais les gens deviennent complètement fous. Ils sont très contents de me voir. Ils ont l’impression de me connaître personnellement, et je dois faire comme si je les connaissais aussi !

AD : Oui.

MJ : Ils ont des posters de moi accrochés au mur, ils écoutent ma musique… Alors ils m’attrapent, ils me prennent dans leur bras, ils me touchent. Donc j’essaie de leur rendre la pareille en leur donnant de l’amour, des câlins, des bisous. Parce que j’aime sincèrement mes fans. Je les aime vraiment, vraiment du fond du coeur. C’est la vérité. Je les adore. C’est comme quand on va dans tel ou tel pays, et ils sont là dehors, ils dorment dans la rue et je leur envoie des oreillers, des couvertures et tout. Et je demande à mes gardes du corps de leur acheter de la pizza pour qu’ils puissent tous manger, on leur donne des bougies…

AD : [Rires]

MJ : Vous savez, on s’occupe bien d’eux ! Ils sont vraiment, vraiment, vraiment adorables et encourageants.

AD : Sam vous demande si vous comptez sortir « Butterflies » en single. Il dit que c’est l’une de vos meilleures chansons.

MJ : « Butterflies » est le single qui tourne en ce moment. Dites-lui merci, merci beaucoup.

AD : Super. En tant qu’innovateur dans le domaine des clips vidéo, quels sont vos prochains projets de courts métrages ? Est-ce que vous faites tout le concept dès le début, ou bien est-ce que vous faites ça au fur et à mesure…

MJ : Eh bien…

AD : En vous disant « Bon, ça c’est le prochain single, et je veux l’illustrer de telle ou telle façon » ? Comment ça marche ?

MJ : Pour les court métrages en particulier ?

AD : Ouais.

MJ : Eh bien, je crois qu’en fait je laisse la chanson me parler, puis je vais dans une pièce et je prends des notes. Ensuite j’en parle à un écrivain comme… Stephen King et moi-même avons écrit « Ghosts » ensemble – le court métrage « Ghosts ». Et c’est au téléphone qu’on a commencé à l’écrire, on l’a laissé se créer tout seul. Donc on essaie de faire des choses très inhabituelles. Et ce n’est pas facile à faire, car il faut le synchroniser avec la chanson et on ne peut pas prendre trop de temps. Parce qu’il faut parfois jusqu’à cinq mois pour mettre les effets spéciaux en place.

AD : Absolument !

MJ : Alors c’est pas facile. Et puis la maison de disques nous dit : « Allez, allez, allez ! Faut y aller, faut y aller ! ».

AD : [Rires]

MJ : Mais bon, je les comprends. Alors on essaie de faire du mieux qu’on peut avec le temps dont on dispose pour le faire.

AD : Si vous ne pouviez chanter qu’une seule chanson pour le reste de votre vie, laquelle serait-ce et pourquoi ?

MJ : Ooh, ça serait sans doute… Si je pouvais en choisir plus d’une, si je pouvais en prendre deux ou trois ?

AD : Oui, je pense qu’on peut aller jusque là.

MJ : « Heal the World », « Speechless », et c’est difficile… Je crois que… Mmm… « You Are My Life ».

AD : Ce sont des chansons à messages, on dirait.

MJ : Oui, parce qu’elles sont très mélodiques et elles contiennent un message qui est très important, qui est immortel en quelque sorte. Elles peuvent correspondre à tout moment et tout lieu, vous voyez.

AD : Il y a quelque chose que je voulais moi-même vous demander. Nous avons subi ces horribles attentats kamikazes ici à New York et à Washington. Quel est le rôle que les artistes peuvent jouer dans ce genre de situation ? Vous avez fait ce concert caritatif à Washington. Est-ce que les artistes peuvent faire quelque chose pour aider les gens à surmonter ce qui a été une période très difficile pour beaucoup d’entre eux ?

MJ : Oui, on donne de nous-mêmes, de notre talent, celui qui nous a été donné par le Ciel. C’est pour ça que nous sommes là ! On apporte un peu d’évasion dans ces moments où les gens en ont besoin. Quand on est peintre, on peint, quand on est sculpteur, on sculpte… Quand on est écrivain, on écrit, quand on est compositeur, on donne des chansons, quand on est un danseur, on donne de la danse. On donne un peu d’amour, de bonheur et d’évasion aux gens. Il faut qu’ils voient qu’on pense vraiment à eux, du fond du coeur, il faut qu’on soit là pour eux. Et pas juste comme ça, de loin, il faut leur montrer qu’on se sent concerné. Vous savez, c’est pour de vrai qu’il faut s’impliquer. On doit être là pour eux. Et c’est ce que j’ai fait, ainsi que beaucoup d’autres gens qui ont aidé, qui ont pensé aux autres. C’est très important.

AD : Comment vous vient l’idée d’un nouveau pas de danse ? Et il vous faut combien de temps pour mettre une chorégraphie au point pour une de vos chansons ?

MJ : En fait, je vais dans une pièce et je me mets à danser. Je ne crée pas la danse, elle se crée elle-même. Parfois quand je fais quelque chose et que je le revois ensuite en vidéo, je me dis : « Wow ! Je m’étais pas rendu compte que j’avais fait ça ! » C’est venu du rythme de la batterie. La danse, c’est une interprétation. On devient l’accompagnement de la musique. Alors quand on devient la basse de « Billie Jean »… Je veux dire, je n’ai pas pu faire autrement que de faire le pas du tout début de la chanson, parce que c’est ce qu’elle m’a dicté de faire. Vous savez, quand je me tourne, quand je tourne sur moi-même, quand je bloque, que je bouge mes jambes sur le côté et puis que je remonte le col de ma chemise, c’est pour coller à ce moment précis de l’accompagnement.

AD : Je me souviens quand j’avais vu ça à la TV [ndt : Motown 25]… J’ai bondi de ma chaise ! C’était tellement extraordinaire.

MJ : Oh, merci beaucoup.

AD : Ca a été l’un des plus grands moments !

MJ : Tous ces mouvements étaient spontanés. Rien n’était prévu à part le Moonwalk. Tout le reste était de l’improvisation en fait.

AD : Tu crois que tu referas un duo avec Janet ?

MJ : J’adorerais faire ça ! Tout dépend de la chanson et du moment où on le fait. Quand elle est à un coin du monde, moi je suis à l’autre bout. C’est très rare que nos routes se croisent. Donc ça n’est pas facile parce que nous sommes tous les deux très occupés. Mais oui, ce serait bien ! J’adore travailler avec elle. C’est une véritable professionnelle et une soeur merveilleuse.

AD : Excellent. Quelle était votre idole quand vous étiez petit ?

MJ : Celui qui me rendait complètement dingue c’était… Des fois il arrivait que je sois au lit [rires] quand on vivait dans l’Indiana… A cinq ans peut-être, quand je dormais, et qu’il y ait un spectacle diffusé très tard – mettons vers une heure du matin. Je me souviens quand ma mère se précipitait dans ma chambre pour me dire « Réveille-toi, réveille-toi ! James Brown passe à la télé, James Brown est à la télé !»

AD : Wow !

MJ : Ou bien « Il y a un spectacle de Sammy Davis Jr » ou « Il y a un bon film de Fred Astaire à la télé ! » [rires], « Gene Kelly passe à la télé là ! »

AD : [Rires]

MJ : Alors je restais assis comme ça… Les yeux scotchés à l’écran ! Donc quand on a inventé les cassettes vidéo, je m’en suis procuré toute une collection !

AD : [Rires] Oui, j’imagine que vous avez une collection extraordinaire de vieux films et des artistes que vous aimez, ceux que vous admirez. Parlez-nous un peu de ce que vous avez, de ce que vous aimez regarder.

MJ : Eh bien je… Avant de faire quoi que ce soit, peu importe la situation, j’adore étudier toute l’histoire de la chose que je vais aborder avant de me lancer. Je fais ça de façon à savoir en quoi je peux innover. Donc j’adore tout étudier à propos des vaudevillistes de cette époque-là, même s’ils n’avaient pas la TV.

AD : Bien sûr.

MJ : Mais plus tard, ils se sont surpassés grâce à la télévision. J’adore les gens comme Jackie Gleason, Red Skelton, je suis fou des Three Stooges, tout ce qui est de Walt Disney En ce qui concerne les interprètes, j’adore Anthony Newley, et puis comme je l’ai déjà dit : Jackie Wilson, James Brown.

AD : Fantastique…

MJ : Mais ils sont incroyables !

AD : [Rires]

MJ : Je veux dire, quand James Brown était avec les Famous Flames, il était tellement incroyable ! J’allais jusqu’à pleurer en le regardant. Je n’avais jamais vu quelqu’un chanter et danser comme ça. Jamais !

AD : Ca a dû être une expérience extraordinaire de rencontrer vos idoles étant jeune alors que vous faisiez des disques, ça a dû être géant !

MJ : Oh oui ça l’était, vraiment ! Et en plus de les entendre me dire qu’ils me trouvaient incroyable ! Alors que toute ma vie je trouvais que c’était eux les meilleurs ! C’était le plus grand compliment qu’on pouvait me faire, et aucune récompense ne pouvait faire le poids comparé à ça. Et Gene Kelly ou Fred Astaire – que je connaissais très bien – ou encore Frank Sinatra m’ont dit qu’ils me trouvaient génial et que j’avais une grande carrière devant moi. Ils me disaient ça quand j’étais enfant. Parce qu’on était voisins, ils habitaient à côté de chez moi. Et donc je me suis senti très honoré et heureux d’entendre ces mots de la part de telles légendes.

AD : Cela a dû beaucoup vous encourager.

MJ : Oui, beaucoup.

AD : C’est vrai que vous allez jouer dans « Men in Black II » et allez-vous enregistrer la BO du film ?

MJ : Euh, je ne pense pas qu’on en fera la BO, mais j’ai fait une petite apparition dans « Men in Black II », et normalement on devrait faire le III aussi. C’était très amusant et excitant. C’est l’un des mes films préférés. Je suis un grand fan de « Men in Black », j’adore ce film !

AD : Je crois savoir que vous allez aussi faire « Les cauchemars d’Edgar Allan Poe ». Vous pouvez nous en dire un peu plus ?

MJ : Oui, ça va bientôt se faire. Ça parle du grand écrivain prolifique qu’était Edgar Allan Poe.

AD : Il est plutôt effrayant aussi, ce type !

MJ : Ouais, il est très diabolique et…

AD : [Rires]

MJ : Et très sombre. Mais c’était un génie. Sa vie privée est très intéressante et c’est ce dont le film parle. De ce qu’il a dû traverser pour créer un travail aussi ingénieux. C’est une super histoire. Et à propos, assurez-vous que les fans le sachent : tous les tabloïds devraient être détruits. Ne croyez rien de ce que vous lisez dans la presse. Ce sont des ordures. On devrait brûler tous les tabloïds, en faire une pile géante et y mettre le feu !

AD : C’est Michael Jackson qui vous le dit !

MJ : Ne perdez pas votre temps avec ça, c’est stupide.

AD : Jason vous dit : « Michael, tu es incontestablement le plus grand artiste de l’histoire du monde. Comment tu fais le Moonwalk ? C’est le mouvement le plus cool que j’aie jamais vu ! »

MJ : Mince… C’est dur à expliquer au téléphone ! Mais c’est une illusion…

AD : [Rires] Je m’en doute !

MJ : J’adore les pas de danse qui font appel à l’illusion. C’est comme si on bougeait un avant et en arrière en même temps. On n’est pas seulement en train de marcher, c’est comme si on était sur un tapis roulant. Et… c’est dur à expliquer ! S’il était devant moi, je pourrais lui montrer comment faire avec mes doigts ou mes pieds. Mais peut-être qu’il pourrait regarder la fin du clip « Jam » où j’essaie de montrer à Michael Jordan comment on fait, pas à pas.

AD : [Rires]

MJ : Je crois que c’est la seule fois où j’ai montré comment on faisait.

AD : Comment faites-vous pour vous pencher en avant dans « Smooth Criminal » ?

MJ : Oh… Smooth Criminal… [Michael est interrompu par un téléphone qui sonne de son côté] J’ai fait ça. C’était en plein milieu du tournage. J’ai intégré ça à la chorégraphie directement. Ca nous a pris une heure à mettre au point. C’est un effet spécial qui nous permet de nous pencher autant que possible, et on laisse le tapis roulant faire le reste.

AD : Est-ce que vous recevez une énergie spirituelle particulière quand vous êtes sur scène ? Vous sentez-vous comme en contact avec une force supérieure ? Car c’est ce pensent pas mal de gens quand ils vous voient en live.

MJ : C’est exactement ça. On est connecté à une source supérieure et on vit l’instant. Et on ne fait plus qu’un avec cet esprit. Et, sans vouloir passer pour un religieux ou quoi que ce soit, mais c’est très spirituel, ça ressemble beaucoup à la religion. C’est un don de Dieu, et je suis honoré qu’on me l’ait donné. Et puis c’est amusant de ne faire qu’un avec le public.

AD : Ca c’est un peu comme quand vous parliez de lorsque vous vous fondez corps et âme dans votre musique pour créer vos mouvements. C’est un sentiment plutôt mystique.

MJ : Merci.

AD : De quels accomplissements êtes-vous le plus fier ?

MJ : Wow… L’un de mes plus grands rêves depuis vraiment tout petit… Je devais avoir environ sept ans, et j’achetais toujours le Livre Guinness des Records… Vous savez ce que je vais vous répondre, pas vrai [rires]…

AD : [Rires]

MJ : Je me suis dit : « Mmm, j’adore danser et chanter. Avec un peu de chance, un jour je serai dans ce livre. » Et j’y croyais. Alors quand « Thriller » est devenu l’album le plus vendu de tous les temps et que ça a figuré dans le Livre des Records… Depuis ils m’y ont mis plusieurs fois. Vous savez, ils m’ont inscrit dedans environ sept fois jusqu’ici. C’était le plus beau jour de ma vie. J’étais tellement content.

AD : D’après vous, d’où vient toute l’ambition et les perspectives que vous ressentiez quand vous étiez gosse ? Les gens ne se rendent sans doute pas compte que vous n’étiez pas forcément riche étant petit, vous ne veniez pas d’une famille aisée, mais vous arriviez quand même à envisager une vie remplie de succès. A quoi attribuez-vous cela ?

MJ : J’attribue cela à mes parents qui nous ont toujours appris à persévérer et à croire en nous, à être sûrs de nous, quoi que l’on fasse. Qu’on balaie le plancher ou qu’on peigne des plafonds, il faut le faire mieux que n’importe qui d’autre au monde, quoi que l’on fasse. Soyez le meilleur dans ce que vous faites et ayez du respect envers les autres, et soyez fier de vous. Soyez honorable.

AD : Absolument. Vous êtes dans la musique depuis longtemps, vous êtes un pilier de la scène musicale depuis des années. Selon vous, quels sont les plus grands changements auxquels vous ayez assisté dans le monde de la musique ?

MJ : Les plus grands changements ?

AD : Oui. Qu’est-ce qui a changé dans l’industrie du disque ou dans la musique que l’on entend aujourd’hui. Qu’y a-t-il de différent de nos jours ?

MJ : Eh bien, je crois que les gens ne s’imaginaient pas que le rap allait durer jusqu’à aujourd’hui. Mais finalement ça a beaucoup évolué. De nos jours on utilise plus de mélodies dans le rap.

AD : Super.

MJ : Du coup c’est plus acceptable parce que la mélodie ne mourra jamais. Et c’est un peu plus rythmique maintenant parce que les gens veulent danser ; ça fait partie de la condition humaine, ça fait partie de notre carapace biologique. Nos cellules dansent quand elles entendent un bon tempo ! Et nous en sommes conscients. Un enfant de un an se mettra à bouger en entendant de la musique – et comment se fait-il qu’il sache déjà bouger ? C’est parce que c’est biologique. Ce n’est pas uniquement ce que l’on entend avec les oreilles, mais aussi ce que l’on ressent dans notre corps, vous savez. Mettez de la musique près de l’herbe, des arbres, des fleurs… Ils seront tous influencés par la musique ! Ils deviendront encore plus beaux et vibrants et pousseront mieux ! La musique est une substance très importante et puissante. Toutes les planètes de l’univers font de la musique, on appelle ça « l’harmonie des sphères » [ndt: théorie développée par le mathématicien grec Pythagore]. Elles produisent toutes une note différente, elles créent une harmonie. Il y a donc de l’harmonie dans l’univers en ce moment même.

AD : Pourquoi est-ce que « Invincible » va sortir dans plusieurs couleurs différentes ?

MJ : Parce qu’on voulait que les fans puissent s’amuser avec et qu’ils puissent les collectionner. Ils sont en édition limitée il me semble… Il y a des albums que j’adore et que j’achète en cinq exemplaires, même si elles ont la même pochette ! Oui, cinq fois, parce que j’aime tellement ces albums. Mais s’ils mettaient une couleur différente ou s’ils changaient la pochette, j’en achèterais cinq de plus !

AD : [Rires]

MJ : Et on voulait juste que les fans s’amusent avec les photos et les couleurs. On a fait ça pour changer un peu… C’est pour ça.

AD : Comment expliquez-vous cette capacité que vous avez à inspirer autant de gens dans le monde ? »

MJ : Eh bien, je fais mon travail et j’adore ça. Et puis j’adore l’art ; j’adore tout ce qui touche à l’art. Et si cela inspire les gens alors j’espère de tout coeur que je fais bien mon travail, je prie pour que ce soit bien ça ma mission sur Terre. Parce que j’adore les fans, j’adore les enfants, j’adore les bébés, et c’est ce qui me donne de l’inspiration. Les enfants, les bébés, les fans. Je les aime énormément.

AD : Michaela vous demande : « Si vous pouviez changer une chose dans votre vie, que changeriez-vous ? »

MJ : J’aimerais pouvoir me promener en public et être normal de temps en temps, sans que les gens me reconnaissent. J’aimerais ressentir un peu ce que c’est que d’avoir une vie normale, voir comment les choses se font, écouter les petites conversations anodines des gens. Parce que dès qu’ils voient que c’est Michael Jackson, ils changent de conversation, ils se mettent à ne parler que de moi et non de ce qui ce passe à cet instant précis.

AD : Oui.

MJ : J’apprendrais beaucoup en faisant cela. Je n’ai pas l’occasion de voir ça sauf quand je me déguise et que je porte plein de trucs, mais du coup les gens se mettent tous à me fixer, donc là encore c’est différent. Voilà pourquoi c’est difficile d’arriver à faire ça. Dites-lui qu’il a posé une très bonne question.

AD : C’est une question très intéressante, en effet. Avec une réponse intéressante également. Quand comptez-vous sortir la chanson humanitaire « What More Can I Give » ?

MJ : Eh bien, on est en train d’y poser les dernières voix. Donc ça va venir très, très bientôt. On est en train d’y mettre les dernières retouches. C’est une chanson très importante pour le monde. Son but est de donner de l’amour, d’aider et de montrer à tous ceux qui sont devenus orphelins, ou qui en l’espace de quelques secondes ont perdu leurs parents ou des êtres chers, qu’on pense à eux.

AD : D’accord. C’est bientôt la fin de l’année là, vous sortez un nouvel album, et les gens essaient de se rétablir après toute cette crise que nous avons dû surmonter. Quand vous pensez à l’année 2002, quels sont les choses qui vous viennent à l’esprit ?

MJ : Mmm… le cinéma. J’adore les films. J’aimerais faire plus de films, y intégrer de la musique. Je pense à la danse aussi. Et puis je souhaiterais qu’il y ait plus de paix dans le monde. Je prie pour la paix sans arrêt. Et la chose la plus importante pour laquelle je prie est la protection des enfants et des bébés. C’est ce qui me préoccupe le plus. Je voudrais qu’ils soient protégés et qu’il y ait plus de droits de l’enfant dans le monde. Qu’il y ait un jour consacré aux enfants, une fête pour les enfants. Qu’on leur accorde plus d’attention et d’amour.

AD : Sergei de Russie vous demande : « Michael, chantez-nous un morceau en a capella ! »

MJ : Ha ha !

AD : [Rires]

MJ : Vous savez quoi ? J’aimerais beaucoup le faire. Mais croyez moi ou non, je n’arrête pas de renifler depuis le début de cette interview…

AD : [Rires]

MJ : Je me suis réveillé avec une laryngite. J’ai attrapé le rhume de mes enfants l’autre jour. Mes enfants étaient malades et j’ai attrapé leur rhume. Mais dites-lui que je me ferai un plaisir de le faire quand je viendrai dans sa ville pour faire un concert. Et l’intro de « Speechless » est a capella – sur l’album. C’est l’une de mes préférées.

AD : Donc l’intro est a capella ?

MJ : Oui, l’intro et l’outro sont a capella.

AD : Nous avons maintenant une question de Karen qui dit que vous l’avez aidée depuis qu’elle était toute petite. Vous avez toujours voulu penser aux autres, vous occuper des enfants dans le monde, « Mais que pourrions-nous faire pour vous ? », se demande-t-elle, « Nous t’offrons toute notre affection mais que pouvons-nous te donner de plus ? » C’est manifestement une de vos grandes fans !

MJ : Quand je me rendrai dans sa ville, j’adorerais assister à un festival d’enfants, avec des chœurs d’enfants… Quand je vais dans différents pays j’aimerais les voir et les entendre chanter leurs chansons préférées de mon répertoire. Et puis on devrait créer un jour pour les enfants, une fête internationale pendant laquelle les enfants seraient mis à l’honneur, où les parents pourraient emmener leurs enfants au cinéma, ou au magasin de jouets, ou au parc… Et rien que ça permettrait de recréer un lien [entre eux]. Parce que les liens familiaux ont été brisés : ils ne mangent plus avec leurs enfants, ils ne leur parlent plus, c’est à peine s’ils s’en occupent. Et j’aimerais vraiment qu’il y ait cette Fête des Enfants, une journée consacrée aux enfants ! On a la Fête des Pères, la Fête des Mères… mais pas de Fête des Enfants. Et en venant dans sa ville, j’adorerais les entendre chanter des chansons dans un défilé ou quelque chose comme ça. Ca serait formidable !

AD : Michael, voici une dernière question… C’est vraiment un plaisir de vous parler… Que diriez-vous à tous vos fans qui ont des rêves et dont le but est de devenir une star comme vous ?

MJ : En dépit de tout, la chose la plus puissante au monde c’est l’esprit humain, la prière, la confiance en soi et la persévérance. Peu importe le nombre de fois que vous devez faire quelque chose, faites-le jusqu’à ce que vous y arriviez. Il faut toujours croire en vous. Et peu importe les gens qui sont pessimistes ou qui vous envoient des ondes négatives, n’y faites jamais attention. Parce que ce à quoi vous croyez fermement, vous le deviendrez.

AD : On dit souvent que ce qui montre que quelqu’un a eu du succès, c’est la manière dont cette personne gère ce succès, avec ses échecs et ses défis. On dirait que c’est ce que vous êtes en train de dire.

MJ : Oui. Et au-delà de tout ça, le plus important… mais vraiment le plus important… c’est de rester humble. Rester humble. D’avoir l’humilité d’un enfant ou d’un nouveau-né. Même si vous devenez quelqu’un d’important ou si vous avez de l’influence sur certaines personnes grâce à votre talent. C’est comme ce que Michel-Ange a fait en sculptant. Vous voyez… malgré tout cela, soyez aussi humble qu’un enfant, qu’un bébé. Et soyez toujours aussi gentil, généreux et aimant. Ne vous laissez jamais dévorer par l’orgueil.

AD : Oui, je crois que nous allons vous poser une toute petite dernière question. C’est bientôt Halloween, vous allez vous déguiser ou faire une fête ?

MJ : Euh, non. Je comptais juste aller faire un peu de porte à porte…

AD : [Rires]

MJ : J’irai frapper aux portes pour avoir des bonbons… J’adore faire ça, c’est l’une des choses que je préfère. J’adore me déguiser en monstre ou un truc comme ça, et puis frapper aux portes. Et comme personne ne sait que c’est moi on me donne des sucreries !

AD : Bon ben si jamais Michael Jackson vient chez vous messieurs dames…

MJ : [Rires]

AD : Soyez gentils, ayez quelques bonnes choses à lui offrire ! Eh bien, Michael, ça a été un immense plaisir de discuter avec vous, c’était super. Et nous vous souhaitons tous beaucoup de bonnes choses pour votre nouveau disque. Nous l’attendons tous avec impatience.

MJ : Merci infiniment. Que Dieu vous bénisse. Merci.

AD : Merci. Voilà, c’était Anthony DeCurtis en chat avec Michael Jackson sur GetMusic. Et pour écouter son dernier album à paraître le 30 octobre prochain, rendez-vous sur michaeljackson.com. Voilà, à bientôt !

Retranscription et traduction réalisées par Birch pour MJFRANCE.