« At Large With Geraldo Rivera » sur FoxNews – 19/01/2005

Le 19 janvier 2005, quelques jours seulement avant le début de son procès, Michael Jackson accordait une interview exclusive au journaliste Geraldo Rivera pour son émission sur la chaîne Fox, « At Large With Geraldo Rivera », diffusée le 5 février 2005.


Geraldo Rivera: Comment allez-vous ?

Michael Jackson: Je vais très bien Geraldo, comment allez-vous ?

GR: Malgré tout ce qui se passe, ça va ?

MJ: Ca va très bien, merci.

GR: C’est merveilleux de vous voir avec vos enfants. Ca, je crois que c’est le vrai Michael Jackson qu’on n’a pas souvent l’occasion de voir. Vous avec vos propres enfants, l’un qui a encore des couches, les deux autres qui sont encore tout petits. Je ne sais pas comment vous arrivez à gérer tout ça sans nounou.

MJ: J’aime prendre soin de mes enfants moi-même. C’est amusant, c’est pour cela que je les ai eus, pour m’en occuper. Ca me fait énormément de bien, ça m’apporte de la joie. Grâce à ça je suis heureux, je ris. Et se sont des enfants merveilleux, adorables et innocents, vraiment.

GR: J’ai vu que vous aviez à décider de quelle chaîne regarder, Nickelodeon ou Disney Channel. C’est difficile à résoudre, des problèmes comme ça.

MJ: (Rires) Oui, vous avez remarqué.

GR: Mais vous avez une vie si normale finalement. C’est touchant à voir.

MJ: Merci, mais c’est grâce à eux vous savez.

GR: Dites-moi ce que vos enfants représentent pour vous.

MJ: C’est dur à expliquer avec des mots. Ils sont tout. C’est pareil que ce que vos enfants représentent pour vous. Ils sont tout mon univers ! Quand je me réveille c’est pour eux que je suis prêt à attaquer la journée. Je leur donne leur petit-déjeuner, je change les couches. S’ils veulent lire, nous lisons beaucoup ensemble. On joue à cache-cache et à colin-maillard. Je m’amuse beaucoup avec eux.

GR: Vous pouvez leur créer un monde qui a l’air au moins un minimum normal. Cela va sans dire qu’ils n’en connaissent aucun autre.

MJ: Je sais que je fais de mon mieux en tous cas.

GR: C’est évidemment une priorité pour vous ?

MJ: Oui, bien entendu. Je veux être le meilleur père du monde, bien sûr.

GR: Est-ce qu’ils savent qui vous êtes ou ce que vous représentez pour les gens ?

MJ: Oui. Ils m’ont accompagné lors de tournées, dans des limousines parmi des foules de fans.

GR: Et ça leur plaît ?

MJ: Ils trouvent ça excitant. (Rires) Ils veulent monter sur scène, ils me tannent pour pouvoir monter sur scène avec moi. Donc bientôt je vais les emmener avec moi et les montrer au monde pour la première fois.

GR: Ils diront « Papa, je veux rentrer à la maison et regarder Nickelodeon. »

MJ: (Rires) Sans doute, sans doute.

GR: Ils font ça aussi ?

MJ: Oui.

GR: Ca vous fait quoi de retourner en studio, de vous concentrer sur votre musique à nouveau. Cela vous fait du bien dans un sens ?

MJ: Cela me fait beaucoup de bien. Car c’est ce que je sais faire. Je me sens complètement dans mon élément, c’est ce que je suis totalement capable de faire, c’est pour ça que je suis là. C’est pareil pour tous les arts, que ce soit le cinéma, la musique, toute forme d’art, j’adore ça.

GR: Donc quand vous êtes le « Roi de la Pop », c’est là que vous êtes le plus à l’aise ou est-ce plutôt le processus de création ?

MJ: Le processus de création, oui j’adore créer. Je suis obsédé par l’idée de créer, j’adore ça.

GR: Je vous ai vus avec Randy. Votre relation tous les deux me rappelle assez comment mes frères et moi sommes ensemble. Qui est-ce qui commande ?

MJ: C’est Randy.

GR: (rires) Ouais c’est ça, c’est pas ce que j’ai remarqué. Mais vous avez confiance en votre famille ?

MJ: Bien sûr, il le faut.
GR: C’est la voix du sang qui est la plus forte, c’est ça ?

MJ: Oui, la famille c’est tout pour nous. C’est l’amour, c’est ce qu’on nous a appris, les valeurs aussi. Et au-delà de ça nous sommes des amis en fait, ce qui est important. Ca n’a rien avoir avec ce que disent les gens dans le public ou la presse, nous sommes des amis. On s’aime énormément.

GR: Est-ce que la famille est toujours solidement unie malgré les ragots ?

MJ: C’est du sensationnalisme.

GR: Comment vous gérez le fait que tout ce qui se passe dans votre vie soit représentée de façon trop exagérée ?

MJ: C’est faux. C’est comme quand on regarde un film de fiction, c’est de la fiction. C’est comme quand on regarde de la science fiction. C’est faux, je sais qui je suis, et c’est triste que les gens aient à lire ces choses et à y croire.

GR: Mais n’avez-vous pas envie de faire une conférence de presse toutes les semaines en disant « Voici la rumeur du jour » ?

MJ: (Rires) Non, parce que je sais qu’à la fin la vérité l’emportera. C’est la vérité qui m’intéresse, vous voyez.

GR: J’ai cherché et je n’ai pas pu trouver une seule personne qui ait été poursuivie en justice autant que vous, pour des raisons complètement abérrantes. Un de vos avocats m’a dit qu’une femme qui s’appellait Bille Jean Jackson l’avait appelé pour dire « N’acceptez plus de chèques, Monsieur, je suis sa femme. » Bille Jean qui est évidemment tiré de votre tube.

MJ: Oui.

GR: Tout d’abord, est-ce que cela vous touche ?

MJ: Si ça me touche?

GR: Oui.

MJ: Oui, mais dans un sens je suis immunisé, je suis très fort, j’ai une peau de rhinocéros. Mais en même temps je suis humain, et tout peut vous faire de la peine. Mais je suis très fort. Tout ce que je veux c’est que les gens n’aient pas à entendre des informations aussi fausses.

GR: Par exemple, vous avez eu des quadruplés l’année dernière, c’est ça ?

MJ: En effet, il y a eu cette rumeur incensée.

GR: Qui sont ensuite devenus des jumeaux, je ne sais pas ce qui est arrivé aux deux autres, ils ont peut-être été enlevés par des extra-terrestres…

MJ: (Rires) Oui j’ai entendu parler de ça. Non je n’ai pas de jumeaux. Ils ont dit que je les cachais ou quelque chose comme ça… Encore une rumeur inventée.

GR: Donc cette histoire est complètement fausse.

MJ: Oui, vous savez je crois que plus la star est grande, plus elle devient une cible. Je ne dis pas que je suis une star super sensass, je ne dis pas ça. Tout ce que je dis c’est que les gens s’en prennent aux célébrités, nous sommes des cibles. Mais la vérité l’emporte toujours. Et j’y crois, je crois en Dieu.

GR: Est-ce que cette foi vous fait tenir ?

MJ: Bien entendu.

GR: Et l’amitié ?

MJ: Comment ça ?

GR: Est-ce que vous comptez sur des amis ? Est-ce qu’il y a des gens qui vous ont été fidèles en toute circonstance ? Qui sont vos meilleurs amis ?

MJ: Mes enfants et ma famille, mes frères et mes soeurs. La plupart d’entre eux [me sont restés fidèles coûte que coûte].

GR: Vous voulez citer les noms de vos vrais amis ?

MJ: Ceux qui sont fidèles, vous ne les connaissez pas. Donc…

GR: Elizabeth Taylor ?

MJ: Elle est très loyale, je vois Elizabeth vraiment très souvent, c’est ma grande amie. En fait j’étais chez elle il n’y a pas longtemps. On a de merveilleuses conversations au téléphone le soir, parfois plusieurs fois par semaine.

GR: Cela fait combien de temps que vous êtes amis ?

MJ: Je suis proche d’Elizabeth depuis que j’ai seize ans. Oui.

GR: Et vous faites de la musique depuis que vous en avec cinq. Vous êtes dans votre cinquième décennie, ça fait 41 ans que vous faites de la musique.

MJ: Oui.

GR: Vous n’en avez jamais ras le bol ?

MJ: Non, pas du tout. Je n’en ai jamais assez.

GR: C’est vrai ?

MJ: C’est vrai.

GR: Et vous n’avez jamais marre de Randy ?

MJ: (Rires) Jamais ! Jamais, jamais, jamais.

GR: Il est là mesdames et messieurs !

MJ: Il est génial, il m’a beaucoup soutenu. Il est vraiment formidable, franchement.

GR: Ils sont tous différents dans votre famille ? Fous, excentriques comme dans ma famille ?

MJ: Tous les frères et soeurs sont différents, comme dans toute famille il y a des éléments différents. C’est ce qui en fait une famille.

GR: Alors que tout le monde surveille votre vie de près, comment pouvez-vous avoir une vie normale ? Comment pouvez-vous vous amuser hors de votre résidence ?

MJ: Je ne peux pas. Je sors parfois de chez moi, mais pas tout le temps. Je crée mon univers derrière mes portes. Car je ne peux pas aller au cinéma du coin, ni au parc au bas de la rue, ni aller acheter une glace au marché, au magasin du coin. Donc dans ces circonstances on préfère créer son propre monde derrière ses portes, et c’est ce que j’essaie de faire. Ce n’est pas uniquement pour moi, si je peux partager ça avec ma famille, mes amis ou n’importe qui, je le fais.

GR: Et cette nécessité pour vous d’avoir un peu d’intimité entraîne toutes ces rumeurs folles et ces spéculations. C’est quand même un équilibre difficile que vous avez à supporter.

MJ: Oui, oui, ce genre de difficultés va avec la célébrité.

GR: Mais vous ne vous plaignez pas, n’est-ce pas ?

MJ: Non.

GR: Je n’essaie pas d’estomper tout ça, pas que je sois le… En fait je ne sais pas de quoi je suis le roi. (Rires) Le roi à me faire tirer dessus peut-être…

MJ: Non, non, non ! Le roi du journalisme.

GR: Alors, qu’est-ce que vous ressentez pour les enfants en détresse ? Vous avez mentionné l’aide aux victimes du tsunami. Qu’est-ce que c’est, c’est votre propre paternité qui motive cela ?

MJ: L’amour, l’altruisme, et le fait de lire la Bible. Etudier ce que sont Dieu, Jésus, l’amour. Jésus à dit d’amener les enfants, d’imiter les enfants, d’être comme de petits enfants, et de s’occuper des autres, des personnes âgées. Et on a été élevé avec ces valeurs. Ce sont des valeurs très importantes. Notre famille et moi-même avons été élevés avec ces valeurs et elles sont toujours énormément ancrées en nous aujourd’hui.

GR: Et les films ? Vous avez fait « The Wiz » et d’autres choses mais on ne vous a pas vu sur grand écran depuis un moment.

MJ: C’est parce que je vais réaliser des films moi-même. J’adore réaliser des films, j’adore la créativité. Et je crois que quand un artiste s’avance avec une production d’un certain type, s’il peut s’exprimer de la façon dont il estime que ça doit être fait… J’arrive à ressentir et à imaginer [ce que je veux créer], je suis un visionnaire. Donc si je peux donner cela, je le fais. C’est ce que j’adore faire avec la musique, avec le cinéma, la danse. J’adore les arts.

GR: Pensez-vous que l’art a un rôle dans la vie réelle ? Et là je fais particulièrement référence à ce disque et à l’aide aux victimes du tsunami.

MJ: Oui.

GR: Vous faites cette chanson pour aider ces victimes, dites-nous à quel moment vous vous êtes rendu compte de l’ampleur de ce désastre.

MJ: J’ai appris ça le lendemain de Noël, et les chiffres augmentaient sans cesse et c’est devenu phénoménal. Même moi je ne pouvais pas croire que c’était vrai. J’étais stupéfait et j’estimais qu’il fallait que je fasse quelque chose. C’est pour ça que Dieu nous a donné du talent, pour donner aux gens et les aider, pour rendre [ce qu’on nous a donné]. C’est ainsi que mes frères et moi avons décidé de faire une chanson.

GR: Vous avez pris le téléphone pour dire « Hey, les gars, réunissons-nous »…

MJ: Absolument, Randy et moi. On a dit « Hey on veut faire quelque chose en studio pour les victimes du tsunami, retrouvons-nous ». Et ils ont dit « Super, allons-y. » Donc on a organisé ça.

GR: Quand vous serez de retour, je pense que les gens apprécieront le fait que vous reveniez au devant de la scène. Ne seriez-vous pas bien plus heureux dans un monde où vous pourriez vous concentrer sur votre art et vos enfants ?

MJ: J’adorerais ça ! Et c’est ce qui me donne de l’énergie, ce médium, cet art. Je l’adore. Et c’est ça le monde dans lequel je suis le plus à l’aise.

GR: Quand vous habitiez à Gary, dans l’Indiana, vous vous attendiez à ce genre de vie à l’âge de 46 ans ?

MJ: Je n’y ai jamais vraiment pensé. Je savais que je voulais faire quelque chose de merveilleux toute ma vie et aider les gens. Mais je n’y ai jamais clairement pensé quand j’étais tout petit. Je chantais et je dansais sans me poser de questions, et je ne comprenais pas pourquoi les gens applaudissaient et criaient. On ne comprend vraiment pas pourquoi [à cet âge-là].

GR: Quand on grandit sur scène de cette façon, quand peut-on comprendre où est notre place dans la société ?

MJ: Je pense que ça met plus longtemps, quand on est plus grand on commence à avoir une personnalité plus complète, le cerveau mûrit et on commence à réfléchir, à comprendre plus de choses et à chercher à savoir. C’est comme ça que ça s’est passé pour moi.

GR: C’est quand même agréable d’avoir une conversation à la télé où les gens peuvent vous entendre parler comme quelqu’un d’ordinaire, de normal, de raisonnable…

MJ: Je suis comme ça tout le temps… je suis moi-même, tout simplement. Que Dieu vous bénisse, merci.

GR: A un moment donné, Michael Jackson et les frères Jackson se sont séparés artistiquement. Est-ce que vous êtes en train de vous retrouver maintenant ? Vous allez évidemment poursuivre votre carrière solo. Qu’avez-vous comme grands projets à cette étape de votre vie, que vous reste-t-il à accomplir ? Qu’aimeriez-vous faire ?

MJ: Il y a beaucoup de surprises au programme. [J’aimerais faire] du cinéma, j’adore le cinéma.

GR: Quoi d’autre ?

MJ: Eh bien, ce n’est pas seulement le cinéma en soi [que j’aime], c’est innover et être avant-gardiste dans ce domaine. [Je veux] envoyer ce médium dans une toute nouvelle dimension.

GR: Vous parlez de vidéo-clips là ?

MJ: Non. Car j’ai utilisé le médium du vidéo-clip pour faire des court-métrages, pour que je puisse atteindre le niveau supérieur. Et je m’amuse beaucoup à l’heure actuelle vous savez.

GR: Ca vous arrive de vous dire: « Mon Dieu, ‘Thriller’ est la meilleure vente musicale de tous les temps » ?

MJ: J’y pense parfois. Mais j’essaie de ne pas trop y penser car je ne veux pas que mon subconscient se dise: « Tu as tout fait, ça y est c’est fini ». Voilà pourquoi je ne mets pas de récompenses ni de trophées dans la maison, vous ne trouverez aucun disque d’or chez moi. Parce qu’à cause de ça on a l’impression d’avoir tout accompli. On se dit: « Regarde tout ce que tu as fait ». Mais je préfère toujours me dire: « Non, je n’ai rien fait encore ».

GR: Le Roi de la Pop, maintenant je vois certains artistes, 50 Cent et un autre – dont je ne me souviens plus le nom – qui sont connus parce qu’ils ont survécu aux attaques violentes où ils ont failli mourir. Et ils font du hip-hop, c’est désormais une ère différente pour la musique populaire. Vous pensez que vous allez plus devenir comme eux, que vous irez vers une musique plus urbaine ? Ou bien pensez-vous que le monde reviendra à une musique plus pop, au rock traditionnel ?

MJ: La grande musique et les grandes mélodies sont immortelles. La mode change, la culture change, les coutumes changent. La grande musique est immortelle. On écoute toujours du Mozart, du Tchaïkovsky, du Rachmaninov, tous les grands. C’est comme pour une grande oeuvre de sculpture ou de peinture, elle est là à jamais, pour que les générations et générations à venir puissent l’apprécier. Et je sais que c’est un fait, c’est la vérité.

GR: J’ai interviewé Barbara Streisand à un point décisif de sa carrière où elle allait faire des duos avec les Bee Gees et d’autres artistes populaires. D’une certaine façon, elle a vraiment changé le tempo pour surprendre les gens. Ca vous dirait de faire des choses un peu plus hip-hop ?

MJ: J’en ai déjà fait beaucoup je trouve. Mais oui, pourquoi pas.

GR: Mais du rap ? Ca vous dirait de faire du rap ?

MJ: (Rires) Des chanson où moi je rap ? Je ne sais pas vraiment raper, je pourrais le faire. J’ai écrit des chansons avec des couplets rap pour des rapers très connus. Mais ils le font bien mieux que moi, donc je ne rivaliserai pas avec eux.

GR: Malgré votre vie isolée et le fait que vous ayez été une star depuis si longtemps vous avez toujours ce qui semble être une relation profonde et passionnée pour la communauté. Est-ce que cela vous fait tenir, est-ce que vous êtes d’accord avec moi ?

MJ: Oui, je suis d’accord car c’est important d’aimer son prochain.

GR: D’où vous vient cet amour presque instinctif ? D’où pensez-vous que ça vienne ?

MJ: Je crois sincèrement que ça vient de ma mère et de Dieu, de la façon dont nous avons été élevés, des valeurs que mon père nous a inculqués étant jeunes. Ma mère était toujours là avec sa Bible, elle nous l’enseignait. On allait à la messe sans arrêt, quelque chose comme quatre fois par semaine. Et je suis si content qu’on ait fait ça car ces valeurs sont très importantes, je ne sais pas si j’aurais pu me débrouiller aussi bien sans ça.

GR: Vous passez toujours du temps avec Maman et Papa ?

MJ: Oui bien sûr !

GR: Ils ne sont pas très loin de nous je crois, c’est bien ça ?

MJ: Tout à fait.

GR: Quel genre de relation avez-vous avec eux ? Je suis tellement proche de ma mère, c’est clair.

MJ: C’est magnifique en fait. A ce moment de nos vies, à cette étape, je crois qu’on a plus tendance à apprécier qui sont nos parents, et ce qu’ils ont fait pour nous. C’est presque comme si on se mettait à tout rétracter… On voit où on en est dans la vie, et on comprend toutes ces choses formidables qu’ils nous ont inculquées, on commence à voir ces choses ressortir et qu’elles portent leurs fruits dans notre vie. Et maintenant je commence à voir beaucoup de choses, comme des traits de caractère qui me viennent de mon père et de ma mère. Et c’est incroyable.

GR: Mon ami Cheech [Marin] que vous connaissez, dont le collaborateur Tommy Chong a participé à la découverte [des Jackson 5], Bobby Taylor and the Vancouvers…

MJ: Oui, j’adore ce type.

GR: Il dit qu’en vieillissant il voit le visage de son père quand il se regarde dans la glace. C’est pareil pour vous ? Est-ce que vous devenez comme votre père ?

MJ: Je ressemble beaucoup à mon père pour beaucoup de choses.

GR: Dites-nous…

MJ: Il est très fort, c’est un battant. Il nous a toujours appris à être courageux, à être confiants, de croire en nos idéaux, et que quoi qu’il arrive, aucune étoile n’est inaccessible. Et grâce à ça on n’a jamais abandonné. C’est ce que notre mère nous a appris aussi. Quoi qu’il arrive…

GR: Donc vous êtes un battant vous aussi.

MJ: Absolument.

GR: C’est comme ça que vous vous voyez ?

MJ: Absolument.

GR: Dites-nous en plus là-dessus ?

MJ: Sur la façon dont je me vois ? C’est à vous de me le dire… (Rires) Non. J’essaie d’être gentil, généreux avec les gens, et de faire ce que je crois que Dieu veut que je fasse. Parfois je prie et je demande: « Mon Dieu, que voulez-vous que je fasse maintenant, où voulez-vous que j’aille ? » Je suis spirituel pour ça, mais je l’ai toujours été, ça n’a rien de nouveau.

GR: Avez-vous vu le film « Finding Neverland » ou avez-vous lu des choses sur James Barrie, l’auteur de « Peter Pan » ?

MJ: Je sais beaucoup de choses sur M. Barrie, enfin je ne devrais pas dire beaucoup, mais j’ai toujours aimé le travail de M. Barrie et je l’admire depuis de très nombreuses années.

GR: Les choses n’ont pas toujours été faciles pour lui, un peu comme pour vous. Je ne veux pas trop rentrer là-dedans. Dites-nous ce qui a mené à la création de Neverland, l’endroit. Il y a trois Neverland, celui de Peter Pan, celui dans l’esprit de Michael Jackson et l’endroit concret qu’il a créé, où je vous ai rendu visite lorsque vous avez fait venir des enfants de quartiers déshérités. Pourquoi avez-vous créé cet endroit ?

MJ: J’ai créé Neverland comme foyer pour moi et mes enfants. Ca s’est presque fait inconsciemment. Comme je l’ai dit plus tôt, où est-ce que je peux aller ? C’est dur… J’ai déjà essayé de sortir simplement, sans me cacher, mais en fait il y a même des policiers qui m’ont dit: « Mettez un déguisement et faites-moi un autographe pour ma femme ! Que faites-vous ici comme ça sans guardes du corps ? » Et il y a des fans partout. Je ne peux pas faire ça, ça m’arrive parfois mais c’est très difficile.

GR: Mais vous possédiez Neverland avant d’avoir vos enfants. C’était pour vous tous les animaux exotiques? C’était pour Michael Jackson ?

MJ: Oh, c’était pour moi et pour partager avec les autres. Ca m’a donné l’occasion de faire les choses que je ne pouvais pas faire étant petit. On ne pouvait pas aller au cinéma ni à Disneyland, on ne pouvait pas faire ces choses amusantes. On était en tournée, on travaillait dur. Et on aimait ça, c’est vrai qu’on aimait ça. Mais ça m’a permis d’avoir un endroit clos où il y a tout ce que j’aime.

GR: Vous créez ce monde imaginaire ou imaginatif comme Barrie. Mais vous arrive-t-il de vous défaire de cela en vieillissant, Michael ? Ne pensez-vous pas parfois que c’est bête d’avoir des llamas et des petits trains et les manèges ?

MJ: Non, ce serait dire que Dieu est bête dans ce cas-là…

GR: Dites-moi.

MJ: Car Dieu a tout créé, les grandes choses et les petites. Donc ça ne serait pas bien [de dire cela]. Mais d’autres hommes ont des Ferraris ou des avions, des hélicoptères ou des choses comme ça, ce qui leur apporte le bonheur. Mon grand bonheur à moi c’est de donner, de partager et de m’amuser simplement et en toute innocence.

GR: Malgré la grandeur de Neverland, votre maison est plutôt modeste. Votre style personnel aussi, je ne vois rien d’extravagant par exemple, comment ça se fait ? Pourquoi n’avez-vous pas un gros diamant avec « Michael » écrit dessus ?

MJ: (Rires) Parce que je suis modeste à ce niveau-là. Si j’avais ce genre de chose je le donnerais au premier gamin qui viendrait vers moi pour me dire: « Wow, j’adore ton collier! — Alors tiens, je te le donne ». Parce que quand j’étais petit, les stars comme Sammy Davis, Fred Astair, Gene Kelly… Si j’aimais quelque chose qu’ils portaient, si je disais simplement: « Mon Dieu, j’adore la chemise que tu portes », ils me la donnaient ! Donc c’est ce qu’on m’a appris vous savez. Ca fait partie d’un trait de caractère des gens du show-business: donner ce qu’on a aux autres.

GR: Malgré l’attention incroyable que les médias vous portent, qu’est-ce que ça vous fait d’inviter des enfants à Neverland, comme le jour où j’étais ici où vous avez invité des enfants de quartiers défavorisés, pourquoi faites-vous cela ? Je voulais vous poser cette question ce jour-là, mais je vous la pose maintenant. Pourquoi ? Dites-moi ce qui se passe dans votre tête quand vous voyez ces enfants.

MJ: J’ai fait le tour du monde plus de huit fois, et je visite autant d’hôpitaux et d’orphelinats que je fais de concerts. Mais bien sûr ça, personne n’en parle. Je ne fais pas ça pour qu’on en parle, je le fais parce que ça vient du coeur. Il y a tellement d’enfants venant de quartiers défavorisés qui n’ont jamais vu de montagnes, qui ne sont jamais montés sur des chevaux de bois, qui n’ont jamais caressé un cheval ou un llama, qui n’en ont jamais même vus ! Si quand j’ouvre mes portes je peux voir ce bonheur, cette explosion de cris et de rires venant des enfants lorsqu’ils courent sur le pont et se précipitent sur les manèges, alors je remercie Dieu. J’ai l’impression d’avoir reçu le sourire approbateur de Dieu, car je fais quelque chose qui apporte de la joie et du bonheur aux autres gens.

GR: Alors vous êtes proche de vos frères et soeurs.

MJ: Oui.

GR: Qu’est-ce que cela vous fait quand il leur arrive des choses comme la panique causée par Janet au Superbowl ?

MJ: Je ne peux pas parler au nom de ma soeur, mais…

GR: Comment avez-vous réagi en tant que frère et en tant que spectateur ?

MJ: Avec affection. En fait je regardais droit vers l’écran et je n’ai rien vu. J’étais chez un ami à La Jolla [ndt: ville située au nord de San Diego], Ron Burkle, on était dans sa salle de cinéma et l’écran était énorme, et je n’ai même pas remarqué [l’incident]. J’ai entendu toute la polémique le lendemain et j’ai dit: « Mais non, c’est faux! »… Je n’ai rien vu du tout.

GR: Vous pensez que cette polémique était exagérée?

MJ: Oui.

GR: Vous croyez que ce phénomène est dû au nom de Jackson ou bien que c’est un témoignage de ce qu’est la société actuelle de ce pays ?

MJ: C’est une hypothèse intéressante également. C’est un peu des deux. C’est difficile pour moi de répondre à cette question. Je préfèrerais ne pas y répondre.

GR: Vous l’avez appellée en lui disant « Ne te prends pas la tête pour si peu de chose » ?

MJ: Oui, quelque chose comme ça. [Je lui ai dit:] « Sois forte, ça passera, ne t’inquiète pas pour ça, j’ai vu pire ». Je lui ai dit « Janet, tu es trop jeune pour t’en rappeller, mais une fois j’ai vu les Oscars avec David Niven, et un homme est arrivé [sur scène] en courant tout nu ! » Il n’est pas arrivé là tout seul, c’était prévu. Mais on n’en a pas vraiment parlé, c’est tout ce que je dirai là-dessus. C’était en direct dans le monde entier, et le lendemain c’était une blague pour les gens, c’est tout.

GR: Oui c’était juste une plaisanterie. Je crois qu’il y a un élément Jackson bien particulier.

MJ: Vous, vous pouvez le dire, vous pouvez le dire.
GR: Voilà je l’ai dit. Je crois que le fait qu’elle soit une Jackson soit une des raisons pour lesquelles l’incident a été exagéré.

MJ: Merci Geraldo.

GR: Concernant le développement du disque qui va sortir, à quoi peut-on s’attendre ? Les gens vont l’entendre à la radio et envoyer des dons destinés aux enfants dans la région de l’océan Indien ?

MJ: J’aimerais beaucoup. Vraiment beaucoup.

GR: Dites-moi comment vous vous sentirez en faisant cet acte de largesse et de compassion. Je sais que moi je préfère donner que recevoir, je crois que c’est une réalité dans ma vie.

MJ: Bien sûr que c’est une réalité…

GR: Expliquez-moi comment cet aspect fonctionne dans votre vie.

MJ: C’est l’idée générale, je ne sais pas si c’est la psychologie de ce concept ou quoi, j’adore tout simplement travailler dur sur quelque chose, le construire, m’y donner à fond et partager ensuite, voir que les gens aiment ce que j’ai fait. Et je prie toujours pour qu’ils aiment, c’est ce qui me donne beaucoup de satisfaction en tant qu’artiste.

GR: Est-ce frustrant professionnellement ou personnellement quand les gens disent que tel ou tel projet qui porte le nom de Jackson a fait un flop ? Votre best of « Number Ones » par exemple s’est vendu à 7,5 millions d’exemplaires. Je crois que ça vaut quatre disques de platine – enfin je ne sais pas comment vous appellez ça – et pourtant certaines personnes dans le monde de la musique font comme si votre musique ne marchait pas. Qu’est-ce que ça vous fait ?

MJ: « Number One » ? Je ne sais pas de quel projet vous parlez mais…

GR: Votre dernière compilation.

MJ: Compilation ? Oh, c’était un immense succès.

GR: 7,5 millions d’exemplaires.

MJ: Oui.

GR: Comment se fait-il que ça ne fasse pas les gros titres, ça « C’est un succès » ?

MJ: Exactement. C’est parce qu’apparemment les informations négatives, le sensationnalisme se vendent mieux que les infos super et positives. Je crois que parfois les gens préfèrent lire des ragots plutôt que la vérité. Mes huit derniers albums sont entrés à la première place des charts. Les gens aiment faire du sensationnalisme et inventer des histoires, des rumeurs. Et parfois…

GR: Ca vous fait de la peine ? Vous n’avez pas envie de crier « Hey attendez une seconde, vérifiez les chiffres » ?

MJ: C’est un caractère courant de l’humanité que je n’aime pas. Cet aspect de l’humanité, cette espèce de jalousie. Mais il y a un autre côté de l’humanité qui est magnifique, non ?

GR: Mais pas chez Eminem.

MJ: (Rires)

GR: Nous en avons parlé, je crois que vous devriez en parler… pourquoi pas ?

MJ: Parler de quoi ?

GR: D’Eminem et du manque de respect qu’il a manifesté envers vous. Stevie Wonder a déclaré qu’Eminem en rajoutait et que c’était vraiment grossier de la part de quelqu’un qui s’était fait de l’argent grâce à la communauté [Noire] de se moquer de cette communauté dans une mise en scène raciste, comme je l’ai dit, effrontée et sectaire. Dites-nous en quoi cela vous a fait de la peine et ce que vous en pensez maintenant.

MJ: Je n’ai jamais rencontré M. Eminem. Je l’ai toujours admiré, et qu’il ait fait ce genre de chose m’a beaucoup blessé… le fait que ce soit d’un artiste à un autre artiste. Et c’est triste, car je pense que ce que Stevie Wonder a dit à ce sujet est vrai. Je ne veux pas vraiment en dire plus. Mais il devrait avoir honte de lui, honte de faire ça. Stevie a dit que c’est un connard. Il a dit ça…

GR: Exact.

MJ: Il a utilisé ce mot-là.

GR: C’est vrai que c’est un connard.

MJ: Je ne dis pas ça, c’est Stevie qui a dit ça. Et Stevie est incroyable, c’est l’un des hommes les plus gentils du monde vous savez.

GR: Lorsque Stevie a dit ça, cela vous a réconforté, comme de l’amour fraternel ?

MJ: Oui, j’adore Stevie Wonder. C’est un prophète musical à mon avis, je l’aimerai toujours. Mais beaucoup de gens respectent Stevie, et c’est l’un des piliers de ce médium et de cette industrie. Quand il dit quelque chose, les gens l’écoutent. Et c’était mal de la part d’Eminem de faire ça. Toute ma vie j’ai été un artiste, et je n’ai jamais attaqué un autre artiste. Les grands artistes ne font pas cela, ils n’en ont pas besoin.

GR: J’ai parlé du fiasco qui impliquait Janet et la réaction exagérée du public. Encore une fois, croyez-vous qu’il n’a fait ça uniquement parce qu’il pensait qu’on ne lui dirait rien parce que vous êtes Michael Jackson.

MJ: Oui mais ça ne me fait pas tant de peine que ça en fait. C’est stupide, c’est tout. C’est plutôt gamin. J’espère qu’il s’amuse.

GR: C’est plutôt méprisable comme plaisanterie, finalement.

MJ: Oui.

GR: Ca vous fait toujours de la peine, et vous ne voulez pas que vos enfants voient ça…

MJ: Oh mon Dieu, je détesterais que mes enfants voient ça. Je détesterais ça.

GR: Mais voulez-vous quand même qu’ils le sachent ?

MJ: Qu’ils le sachent ? Non.

GR: Pour finir, vous savez que nous avons soigneusement évité de parler de l’affaire, nous n’en avons pas du tout parlé. Vous êtes soumis à une injonction de la cour. Je sais que vous avez obtenu du juge la permission de lire une déclaration.

MJ: Oui.

GR: Vous savez, je déteste finir une interview de cette façon, mais si vous voulez lire ce communiqué maintenant, je crois que c’est important.

MJ: Oui. Ces deux dernieres semaines, beaucoup d’informations horribles et malveillantes ont été diffusées dans les médias à mon sujet. Apparemment, ces informations proviennent de transcriptions des réunions du grand jury sans que mes avocats ou moi-même ne soyons présents. Ces informations sont dégoutantes et fausses. Il y a quelques années j’ai invité une famille à visiter et passer du temps à Neverland. Neverland est ma maison, je les ai invités dans ma maison parce qu’ils m’avaient dit que leur fils etait atteint du cancer et avait besoin de mon aide. Au fil des années, j’ai aidé des milliers d’enfants malades ou en détresse. Ces évenements ont été un cauchemar pour ma famille, mes enfants et moi. Je compte ne plus me montrer aussi vulnérable à l’avenir. J’aime ma communauté et j’ai une grande confiance en notre systeme judicaire. S’il vous plait, gardez l’esprit ouvert et laissez-moi faire mes preuves au tribunal. Je mérite un procès équitable comme tout citoyen américain, je serai acquitté et innocenté lorsque verité sera dite.

GR: Vous souhaitez dire autre chose?

MJ: Non, non… Si, une chose, j’aimerais que les gens prient pour mes enfants et moi.

GR: Ok mon pote, voilà !

MJ: Ok.

GR: Merci.

MJ: Merci à vous.
Retranscription et traduction réalisées par Birch pour MJFrance.