La page You Tube « Celebrity Classified » propose depuis le 2 février des extraits d’une conversation de trois heures entre Michael Jackson et un biographe. L’enregistrement date des années 80 et ce bien avant la réalisation de son autobiographie Moonwalk.
Si le 3 février dernier nous vous proposions la traduction du volume un, voici pour vous aujourd’hui la traduction du volume deux dont l’audio se trouve sur You Tube.
Michael Jackson: J’ai toujours aimé que les choses se fassent vite, mais j’ai réalisé qu’avec l’excellence vient la patience. Il faut y aller progressivement, lentement, quand on conçoit quelque chose, jusqu’à obtenir le parfait bijou. Comme Attenborough qui a fait des recherches sur Gandhi pendant 20 ans, il y a beaucoup d’histoires sur des personnes qui ont monté des projets, comme la peinture des plafonds dans les chapelles au XVIème siècle, ce genre de choses. J’adore ce genre de personnes, je les étudie, et je réalise à quel point elles se sont investies, avec du sang, de la sueur et des larmes. Vous regardez leur travail et vous commencez à pleurer, et vous n’arrivez pas à croire ce que vous voyez.
Devenez-vous plus patient ? Voulez-vous agir moins vite ?
J’aime bien que les choses soient faites rapidement, je déteste quand on me dit que je ne peux pas avoir quelque chose avant demain. Je déteste ça. Par exemple je dis: « Sherry, peux-tu avoir ça de telle ou telle personne », et en deux temps trois mouvements elle l’obtient. C’est comme ça que j’aime que les choses soient faites.
Quand vous dites que vous n’êtes pas satisfait d’un concert, quand vous montez sur scène, que faites-vous pour être à l’aise… vous avez dit que vous pourriez passer 24h/24 sur scène… que ressentez-vous quand vous montez sur scène ?
Ce que je ressens ?
Oui, qu’est-ce qui vous donne de la joie quand vous êtes sur scène ? La façon dont réagit le public ?
Je me sens bien, je suis dans mon élément, je suis né pour ça.
Qu’est-ce qui fait que vous vous sentez comme ça ?
C’est un sentiment très agréable. C’est comme… je suis dans mon élément. Comme un peintre qui peint, il fait tout son possible pour faire la meilleure peinture du monde. J’ai déjà discuté avec des pilotes, ils disent qu’ils aiment voler, qu’ils sont dans leur élément. Vous voyez, c’est un sentiment qu’on ne peut pas nous retirer.
Ressentez-vous la même chose en studio…
Oui, ou devant la caméra… une caméra 35 millimètres. Ou les regarder tourner. J’ai déjà entendu Tito ou certains de mes frères dire: « Mon Dieu je suis content quand c’est fini », quand nous travaillions dans le passé en plateau, ou sur un clip ou un spectacle, ou une émission de télé… assis là, fatigués, en train de geindre, de gémir. Je ne comprends pas ça… parce que j’observe, j’apprends, je regarde ce que le réalisateur essaye d’obtenir, ce que le concepteur lumières fait, d’où vient la lumière, et pourquoi il le fait tellement de fois. Et les changements dans le script.
On a l’impression que vous ne ressentez pas beaucoup de pression, alors que vous faites tout. Y a-t-il quelque chose qui vous mette sous pression ?
Oui, quand je dois respecter une deadline, quand on me dit: « Tu dois être prêt pour telle date ».
Comment vous sentez-vous ? Je veux dire, est-ce qu’il y a des tensions ? Etes-vous nerveux ? Comment se manifeste cette pression ?
Je ne pense pas que ce soit juste. C’est stupide. C’est une honte. Vraiment. Je déteste la télévision. Je déteste.
Mais comment se manifeste cette pression ? Je veux dire, quand vous faites un album, vous sentez-vous sous pression de devoir le terminer à temps et de respecter les délais, ou est-ce la pression de faire un bon album ?
Faire qu’un album soit bon, c’est merveilleux. Ce n’est pas de la pression. C’est merveilleux, jouer ces morceaux, honnêtement, c’est le meilleur sentiment au monde. Quand vous avez cette chose entre les mains, et que vous la matérialisez sur la bande, et que vous obtenez ce que vous vouliez, c’est génial !
D’où vient la pression alors ?
Quand on me presse. Quand on me demande de me dépêcher en me disant: « Ce ne sera jamais prêt », alors qu’on se casse la tête pour respecter la deadline. Nous avons presque perdu l’album entier.
Pour Thriller ? Comment ça ?
Thriller avait l’air tellement merdique. Nous avions la pression parce que nous travaillions sur E.T. et sur Thriller, et CBS nous disait: « Il faut que ce soit prêt à cette date », Walter Yetnikoff et cet autre gars qui s’affrontaient… les mixages étaient nuls, et nous avons écouté tout l’album, et j’ai pleuré comme un bébé, je suis sorti en trombes de la pièce et j’ai dit: « Nous ne sortons pas ça. Appelez CBS et dites-leur qu’il n’auront pas cet album, nous ne le sortirons pas ».
Il y a une chance Mike que si vous n’aviez pas réagi de cette façon il soit sorti comme ça ?
Ça aurait été terrible. Ce ne serait jamais devenu l’album le plus vendu de tous les temps. Jamais. On peut gâcher un album génial avec le mixage, comme on peut gâcher un grand film au moment du montage et du découpage de la pellicule, avec les meilleurs prises qui finissent sur le sol de la salle de montage. Prenez votre temps !
Est-ce qu’à l’époque on vous a dit que l’album était bien et que vous étiez trop pointilleux ? Qu’il fallait aller de l’avant ?
Je suis ce que me dicte mon cœur.
Est-ce que certains vous ont fait cette suggestion ?
Non. Parce qu’ils savaient. Mais j’ai été le premier à le dire, ils avaient peur de le dire. Je leur ai dit: « Il faut tout recommencer ». Donc nous avons pris quelques jours de congés. Nous sommes revenus avec un regard neuf, des oreilles neuves. Nous avons mixé deux chansons par semaine. Nous avions envie de frapper fort. Thriller a été un projet difficile.
Quand vous subissez cette pression, comment faites-vous ? La pression vous rend-elle déprimé ? Vous donne-t-elle envie de vous cacher ou de vous enfuir ?
Je vais là où il y a des enfants.
Allez-vous voir des enfants parce que vous pensez qu’ils sont plus heureux ? Ou est-ce la joie…
C’est la magie des enfants. Pendant Thriller à un moment je me suis senti très mal. L’un des membres de l’équipe de maintenance du studio avait un vélo, et j’ai pris le vélo et j’ai roulé jusqu’à la cour de l’école et j’ai regardé. Quand je suis revenu j’étais prêt à déplacer des montagnes. Je suis entré dans le studio et j’ai tout déchiré. C’est vrai.
Organiser cette tournée Victory ensemble a-t-il été source de beaucoup de pression ?
Ayant été brûlé j’ai été éloigné, enregistrer toutes ces chansons que je n’avais pas faites… mon Dieu c’était énorme… j’aurais été surexposé pendant des jours… comme si ce n’était pas déjà le cas… quant à organiser le show ensemble, mes frères ne m’ont pas donné l’aide et le soutien que je… bon, c’est difficile… nous avions tous dit que nous allions y réfléchir, mais ils ne soumettaient jamais d’idées, donc toute la pression reposait sur mes épaules.
Comment est-ce que ça se passait tous les soirs sur scène ? Vous n’étiez pas vraiment satisfait du spectacle ? Vous vous sentiez gêné ou…
… en colère.
J’ai remarqué une chose, encore plus que pour la plupart des artistes pop, même si vous aviez Frank, vous preniez beaucoup de décisions tout seul, à un degré inhabituel vous vous managiez vous-même, est-ce quelque chose que vous estimiez nécessaire, ou est-ce encore plus de pression ? Est-ce quelque chose sur lequel vous insistez ?
J’insiste là-dessus, je veux suivre ma propre voie. Je suis capitaine de mon bateau et je ne dis pas : « Ecoute, je ne veux pas entendre ce que tu as à me dire, ou je veux bien entendre ce que tu me dis mais j’ai raison ». Non, je ne fais pas ça. Je prends toutes les suggestions, j’écoute ce que tout le monde a à dire, mais la décision finale me revient.
Quand avez-vous commencé à prendre vos propres décisions ? Vos décisions pour votre carrière, ça remonte à quand ?
Une fois, nous avons fait une tournée avec un type qui nous a vraiment arnaqués. Son nom était Leonard Rowe. Mais il ne nous a pas… il nous a arnaqués d’un point de vue matériel, mais sur cette tournée il m’a appris une chose…
C’était quand ? Au milieu des années 70 ? Après votre départ de la Motown ou avant ?
C’était après la Motown. Il m’a dit: « Ecoute, ces gens travaillent pour toi, tu ne travailles pas pour eux. Tu les paies. C’est à toi de leur dire quoi faire. Tu dois leur dire ». Et il m’a toujours dit: « Souviens-toi de ça. Je te le dis, je veux que tu t’en souviennes ». Et ça signifiait beaucoup pour moi, parce que venant de la Motown, nous avions toujours plein de monde qui faisaient des choses pour nous, j’ai toujours compté sur des gens pour faire les choses à ma place, et ils font toujours les choses à ma place, des personnes qui prenaient des décisions à ma place, mentalement j’ai été marqué par ça.
A la Motown ?
Oui. Du genre: « Tu dois porter ça, tu dois chanter ces chansons, tu vas ici, tu vas donner cette interview, tu vas faire cette émission de télé ». C’est comme ça que ça se passe si on ne dit rien. Mais après cette période, quelque chose s’est révélé.
Etait-ce plus facile de le faire à la Motown ?
C’était plus facile mais ce n’était pas toujours bien.
C’est en vieillissant que vous avez réalisé que ce n’était pas bien ? Avez-vous eu du mal au début à prendre des décisions ? Les gens ont-ils pensé que vous étiez méchant ?
Non, je n’ai jamais été comme ça… méchant. Je disais juste aux gens: « Ecoute, c’est moi qui te paie ».
Les personnes à qui vous donniez des ordres, ou des instructions, ont-elles commencé à se dire que vous aviez pris la grosse tête ? Vous l’avez fait de façon à qu’ils comprennent ?
Oui.
Certaines personnes ont-elles résisté ? Vos frères, votre famille, ou d’autres personnes ? Ils ont tous réalisé qu’il était temps…
Il y a une chose avec laquelle je ne joue pas du tout. Je ne supporte pas qu’une personne soit malhonnête, premièrement. Je ne supporte pas qu’une personne trompe une autre personne, quoi qu’il arrive. Et je crois en l’équité, parce que je suis quelqu’un de juste. Et les personnes qui me représentent, les avocats, les comptables, doivent effectuer un travail de haut niveau. Je veux dire par là qu’ils doivent être les meilleurs dans leur domaine, parce qu’en ce qui me concerne je donne le meilleur de moi-même. Et je suis très dur avec eux sur ce point.
Mais Mike, quand ce type vous a dit que vous deviez faire plus de chose, qui prend les décisions pour vous à ce moment-là ? Vous aviez quitté la Motown, vous aviez des managers, ou était-ce votre père…
Papa… les frères.
… ou aviez-vous des conseillers à ce moment-là ?
Oui, ils étaient là. Ils n’étaient pas toujours justes.
Traduction: PYC.