Le magazine JAM est de retour. Son numéro 2.5 sort dès aujourd’hui et actualité oblige, il s’intitule Thriller 40.
Si les fans français seront ravis de revivre la sortie d’un tel magazine, voici pour vous une interview de Richard Lecocq qui nous en dit plus sur son contenu et sur bien d’autres choses encore.
Bonjour Richard et merci de nous accorder cette interview. Un nouveau numéro pour le magazine JAM sort aujourd’hui alors que beaucoup de fans ne devaient pas s’y attendre. Avec internet et la perte de vitesse de la presse papier, on connait tous la difficulté d’arriver à sortir encore de nos jours un magazine spécialisé Michael Jackson. Qu’est-ce qui te pousse encore aujourd’hui à vouloir sortir un nouveau numéro qui, nous n’en doutons pas, enchantera les fans français ?
Bonjour François, et merci pour cette interview. Tu as bien résumé la chose : le support papier est toujours en crise, et publier un magazine sur un artiste disparu il y a plus de 13 ans à présent pourrait être perçu comme de la folie. De mon côté, c’est toujours et encore la passion qui m’anime. JAM est un magazine confidentiel, et cela me plait car même s’il ne parait que de façon irrégulière, il continue d’intéresser les passionnés. La conception de chaque numéro nous mène à travers des rencontres, des découvertes, et des choix pour essayer de livrer un contenu cohérent.
Peux-tu nous dire ce que ce numéro contiens ? Un dossier spécial Thriller 40, des interviews et analyses, mais encore ? Pourquoi un numéro 2.5 plutôt qu’un numéro 3 ?
Ce numéro revient sur le projet Thriller 40, la sortie phare de 2022. Il y a aussi des articles consacrés aux époque BAD, Dangerous et HIStory, sans oublier un coin d’œil aux années Motown. Certains articles du site ont été revus et agrémentés de nouvelles informations pour déboucher sur des versions finales présentes dans ce numéro. Il y a également des interviews et un focus sur deux CD’s qui ont retenu notre attention. On a essayé de se poser et de prendre le temps de livrer un magazine qui capture ce qui s’est passé cette année. Il s’agit du numéro 2.5 pour annoncer une nouvelle façon de livrer les numéros à venir : ceux en .5 seront en français, les chiffres ronds en anglais.
Thriller 40 a eu son lot de discussions actives, ses critiques et ses constats pour en finir par conclure que des inédits sont toujours bons à prendre. Est-ce que le fan de Michael Jackson d’aujourd’hui doit-il se contenter du strict minimum ou peut-il toujours espérer voir un jour quelque chose de magique arriver ? Peux-tu également nous parler de l’absence très remarquée de Quincy Jones dans ce projet ?
Thriller 40 est la suite logique du travail engagé par l’Estate depuis des années : une gestion en autarcie, en se coupant des interlocuteurs et collaborateurs clés de Michael. Le passif avec Quincy Jones est lourd : l’Estate et lui se sont affrontés au cours d’un procès fleuve pour une histoire de contrats et de royalties non respectés. Au final Quincy a perdu. Depuis la création de l’Estate, il n’a jamais été invité par l’Estate à participer à quelconque projet. Dans le documentaire BAD 25, ses interventions sont tirées de l’interview qu’il avait donnée dans les années 80 pour le documentaire The Legend Continues. C’est un monde où tous les chats sont gris. On peut aussi faire un tas de reproches à Quincy, mais on ne peut pas lui retirer une chose : c’est lui qui était aux côtés de Michael sur la trilogie Off the Wall, Thriller et BAD. Il a permis à Michael de prendre confiance sur pas mal de points en studio, même si son génie éclatant était déjà là et n’attendait qu’à exploser. Il n’y a qu’à écouter les demos de Don’t Stop Til You Get Enough et Billie Jean pour s’en rendre compte. Pour en revenir à ta question, je pense que les fans et le grand public méritent bien plus, mais nous prenons les balles perdues de ces luttes d’influence autour de l’héritage de Michael. Ce point est abordé dans un des articles de JAM 2.5.
Abordez-vous les qualités audiophiles des différentes supports sortis pour Thriller 40 comme le vinyle UltraDisc One-Step de chez Mofi ou encore le SACD ? Penses-tu qu’il s’agit là de véritables supports indispensables ?
Oui, on revient sur la sortie de ces pressages, mais loin de moi l’idée de porter un jugement définitif sur eux. Il s’agit de belles éditions intéressantes à collectionner. À l’écoute, tout est tellement subjectif, entre le matériel que chacun utilise, et aussi la sensibilité de chaque oreille. J’en parlais récemment avec un ami et on s’est rendu compte que les tous premiers pressages CD de Thriller avaient déjà une bonne dynamique et ne souffraient pas d’une compression abusive qui est devenue la norme dès le milieu des années 90. MoFi a traversé une controverse cet été concernant la réalisation de ces éditions luxueuses, mais malgré cela, ce label a le mérite de prendre le temps de réaliser des rééditions respectueuses. Le SACD par exemple est de très bonne facture, alors que le mastering du double CD disponible à grande échelle est un véritable massacre. De mon côté, le pressage vinyle Master Sound japonais a toujours sa place de choix dans ma collection.
L’Estate, le site officiel, la page Facebook etc etc ont une fois de plus montré un côté très amateur de ce qui devrait être à la hauteur du plus grand artiste de tous les temps. Comment expliques-tu cela et comment expliquer qu’avec toutes les bourdes passées, rien ne semble véritablement s’arranger ? Sans tout dévoiler, je crois que vous abordez le sujet dans ce nouveau numéro de JAM magazine ?
Oui, il y a un article intitulé « Estate of Shock » qui se penche sur la cuisine interne de l’Estate. À vrai dire, on pourrait en faire un livre. Les gens qui gèrent l’Estate sont des administratifs, ils n’ont pas de formation artistique. Ils font appel à des agences pour gérer certains aspects de leur image, mais faute de comprendre la culture Michael Jackson, on en arrive aux multiples ratés que nous constatons sans cesses : posts Facebook hors sujet et truffés d’erreur, merchandising peu intéressant, sans oublier le fameux logo Thriller 40. J’en finis par regretter les années où Bravado gérait le merch de Michael au début des années 2010, c’est dire…
Un magazine comme JAM aurait été le bienvenu de la part de Sony par exemple, pour promouvoir la sortie de Thriller 40 (Thriller 25 avait eu son book). Or, nous avons vu que la promo en dehors du Japon (comme d’habitude) n’était pas véritablement à la hauteur. Pourquoi Sony ne s’investi plus autant dans les sorties jacksonniennes et qu’en est-il de Sony France en particulier ? Beaucoup de fans ont eu du mal à trouver ne serait-ce que la version 2CD dès sa sortie.
Sony au Japon est un cas à part, car c’est la maison mère, et le marché japonais est très indépendant dans ses actions de promotions. C’est toujours un plaisir de récupérer les pressages et goodies qui viennent de ce pays car ils sont toujours de très bonne qualité. Pour le reste du monde, c’est l’Estate qui valide toutes les décisions promo. Pour Thriller 40, et notamment les soirées « fan events », des idées vraiment sympas son restées au placard car l’Estate n’en voulait pas. Pourquoi ? Eux seuls le savent. La promo fut très timide, les médias ont suivi sur le moment, mais tout le monde semble être déjà passé à autre chose. C’est dommage car Thriller garde un potentiel incroyable avec un tas d’actions et de choses possibles. Concernant le double CD, de ce que j’ai compris, la première mise en place n’était pas assez importante et le tir fut vite corrigé : à ce jour le double CD est facilement trouvable, même si ça manque cruellement de PLV sur les points de ventes. L’Estate promet d’autres actions en 2023 autour de Thriller, sans donner plus de détails. On attend et on verra bien.
Avec tous les livres sortis, celui de Thriller 25, les magazines, le livre La Totale et bien d’autres, on se rend compte qu’il y a toujours quelque chose à découvrir avec Michael Jackson et les inédits de l’album sont encore là pour nous le rappeler. Qu’est-ce qui n’a pas encore été dit au sujet de l’album Thriller ? Et devons-nous nous attendre à de nouvelles découvertes, qui sait, pour le film à venir ou pour un éventuel Thriller 50 ?
J’ai l’impression que Thriller est un sujet sans fin. 40 ans après on découvre encore des choses, comme ces demos sur le double CD, même si certaines, à mon avis, ne sont pas issues de cette période. Il y a encore des pépites qui dorment dans les archives, ne serait-ce que le premier mixage de l’album, qui a du être repris pour donner la version que nous connaissons aujourd’hui. À mon sens, la vraie bonne surprise de ce projet Thriller 40 est la sortie de Beat It et Thriller en HD. Ces short films méritaient de revoir le jour dans toute leur splendeur. Dommage là encore qu’aucun BluRay n’ait suivi dans les bacs. On attend l’arrivée de Billie Jean également, mais la source étant du 16mm, le travail de restauration est moins facile apparemment.
Qu’attends-tu du film biographique sur Michael Jackson ?
En tant que fan, je sais que j’aurais toujours des choses à redire sur un tel projet. On va toujours pinailler sur une date, une référence, un fait relaté de telle ou telle façon. J’ai déjà intégré ça dans mon lot de réactions à venir, du coup je reste zen. Plus sérieusement, j’attends de ce film de présenter l’image et la carrière de Michael de façon éclatante auprès du grand public, au point que cela draine une nouvelle génération de fans, et que cela déclenche un engouement autour de Michael, avec si possible en guise de cerise sur le gâteau, une mise au point définitive sur les affaires dont il a été victime. J’en demande peut-être trop, mais je continue d’espérer.
MJStreet, La Totale, le magazine JAM, les interviews télés et radios… Tu es toujours présents pour représenter les fans lorsqu’il le faut mais penses-tu qu’en 2022, ils sont toujours aussi nombreux qu’il y a 5 ou 10 ans ? Le peux de réussite d’une sortie française de Thriller 40 est-il à ton avis uniquement à mettre sur le compte de peu de promo ou est-ce que finalement c’est parce que les fans ne sont pas aussi nombreux qu’avant ?
Il y a de fait un renouvellement de fans moins important et fréquent qu’avant. Je remarque ceci dit qu’il y a pas mal de jeunes qui sont touchés par la musique et la danse de Michael. Il suffit de se rendre sur Instagram, TikTok ou encore Twitter pour s’en rendre compte. Les vieux de la vieille sont toujours là et ça fait chaud au cœur aussi. Je ne pense pas qu’il y ait un lien entre le nombre de fans actifs et les choix de l’Estate et de Sony concernant la promo de Thriller 40. Je pense que l’Estate a peu misé sur Thriller 40 car, contrairement à un projet comme Xscape dans lequel il a beaucoup plus investi, il n’y a pas ici de titre utilisé comme single. C’est dommage encore une fois, car je pense qu’il y avait de quoi créer un rendez-vous plus fort autour de cet anniversaire. Les choix de l’Estate sont parfois difficiles à comprendre, comme la fois où ils ont sorti ce coffret hors de prix pour les 10 ans de This Is It. Le stock leur reste sur les bras. Ce n’était pas un projet intéressant dès le départ, et à l’arrivée des courses, tout le monde y perd : c’est un échec pour eux, et les fans se sentent ignorés, à juste titre.
Nous avons vu que l’album Thriller était donc ressorti en double CD, en vinyle, en SACD et en version vinyle audiophile. Dernièrement c’est The Wiz qui est ressorti en DVD et Blu-Ray en France. D’anciens albums ressortent régulièrement en CD ou vinyle. Et ton magazine sort un nouveau numéro. L’ère du tout numérique et du dématérialisé n’est donc pas encore venue ou est-ce parce que l’ancienne génération est toujours là ?
C’est une très bonne question. Le numérique ne suffit pas et ne comble pas tout. Dès qu’il s’agit d’artistes aussi importants que Michael Jackson, il y a toujours un marché de collectionneurs et un public qui achète de la musique sur support physique à toucher. Le vinyle refait partie de nos vies quotidiennes, alors que personne ne voulait en entendre parler il y a quelques années. Une partie du public a besoin de ce rapport avec l’objet. Ça me fait penser au retour de la photo imprimée via des albums que l’on peut créer en ligne : ils sont populaires car les gens s’y retrouvent : il ont accumulé beaucoup de souvenirs avec leurs appareils photos numériques ou leurs smartphones mais qu’en reste-t-il, surtout si les cartes mémoires ou disques durs se dégradent ? On a tous dans nos collections des vinyles qui ont survécu à des centaines de fichiers mp3 perdus à jamais. Même si certaines majors disent que le support physique finira par disparaître, je n’y crois pas trop. D’un autre côté la hausse des prix sur les vinyles neufs peuvent nuire à l’écosystème. Comme toujours dans le monde de la musique, il faut trouver le bon équilibre.
A voir l’arrivée d’un nouveau numéro de JAM, on se dit qu’il y en aura obligatoirement d’autres. Peux-tu nous le confirmer et qu’est-ce que tu as envie de rajouter au sujet du magazine, de ta passion ou encore de Michael Jackson à cette interview ?
Oui, il y aura une suite à JAM, le numéro 3, qui sera un numéro en anglais, avec un concept type anthologie, un peu comme celui des Jacksons publié pour les 40 ans de l’album Live. Le thème est déjà choisi, et j’ai hâte de m’y mettre. Entamer des recherches, écrire, discuter et échanger sur la carrière de Michael, c’est vraiment quelque chose de passionnant, et 40 ans après la sortie de Thriller, je suis heureux de partager cette passion, qui reste aussi forte qu’au premier jour.
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Sommaire :
- THRILLER 40 : MISSION IMPOSSIBLE
- KING OF BILLBOARD
- MOBILE (IN)FIDELITY ?
- THRILLER PAR NELSON GEORGE : LE DOCU ULTIME ?
- HOMMAGE À ROBERT PAYNTER
- THRILLER 40 : LES BONUS
- DOCUMENT : EBONY, DÉCEMBRE 1982
- INTERVIEW : GLEN WEXLER
- ESTATE OF SHOCK
- INTERVIEW : JEFFREY SPEAR
- BAD BOOTLEGS : LES CD DE NISHINOMIYA ET OSAKA
- LES SECRETS DE DANGEROUS
- DANGEROUS GIRLS
- HISTORY TOUR MADE IN KOREA
- DOSSIER : THE SINGING MACHINE COLLECTION
- BIOPIC, FAIS MOI PEUR!
Ce numéro est disponible uniquement en français.