Soul magazine, 30 novembre 1970.

Le 30 Novembre 1970, le magazine américain « SOUL » faisait sa UNE avec les Jackson Five.

Nous vous proposons de découvrir, un peu comme si vous l’aviez dans les main, le magazine « SOUL » de cette fabuleuse année 1970. Vous y découvrirez le récit d’un certain Bob Jones, décrivant la folie de cette période, les problèmes de sécurité dus à la jacksonmania et les chiffres de cette tournée record. Il est difficile de s’imaginer aujourd’hui, le poids qui pesait sur les épaules de ces cinq jeunes garçons et d’un certain Michael Jackson en particulier. Bonne lecture…

Les Jackson Five ont ébloui 100 000 fans en adoration.

Dans un souci permanent d’apporter à nos lecteurs une couverture vivante des événements importants qui se produisent dans le monde de la soul, le magazine SOUL vous présente l’histoire de la tournée record à un demi million de dollars des Jackson Five, tournée qui a traversé tout le pays, et qui nous est racontée par le journaliste qui a accompagné le groupe pendant son voyage. Bob Jones est chroniqueur pour les journaux « 80 Black » au niveau national et publiciste pour le groupe Rogers, Cowan & Brenner (qui sponsorise la plupart des shows Motown). Monsieur Jones a rapporté, dans le détail, les événements survenus pendant le voyage passionnant qu’il a fait avec les Fabulous Five, à la rédactrice en chef de SOUL, Judy Spiegelman.

La sécurité était la préoccupation première

Fatiguée et épuisée comme on peut l’être après un travail bien fait, la famille la plus soul d’Amérique, les Jackson Five, est rentrée à la maison sous la chaleur ensoleillée du Sud de la Californie après deux week-ends à parcourir le pays avec un spectacle qui a battu des records de fréquentation à l’échelon national, et qui a rapporté plus d’un demi million de dollars.

Les jeunes garçons étaient accompagnés à travers tout le pays par leur père, Joe Jackson, le personnel de la Motown, des tuteurs, des publicistes, des techniciens, et bien sûr leurs cousins Ronnie Rancifer et Johnny Jackson, soit au total un entourage de 17 personnes.

La sécurité était la préoccupation première lors de cette tournée et pour cette raison l’heure des vols et les réservations d’hôtels ont été gardées secrètes jusqu’au départ et jusqu’à l’arrivée dans chaque ville. Avant de partir pour la tournée, les solutions d’évacuation de la scène ont été planifiées à partir de dessins des différents stades où le groupe devait jouer, de façon à ce que si le groupe était pris d’assaut sur la scène, tout le monde saurait comment les faire sortir.

Le premier concert a eu lieu le 9 octobre, à Boston, dans le Massachusetts, et tout s’est déroulé comme prévu. Les garçons ont pris un vol direct à destination de Boston et ont pu se rendre à l’hôtel sans incident. Pendant ce temps au Boston Gardens, des charpentiers érigeaient une plateforme de 5 mètres de haut qui ferait office de scène pour le concert du soir. Les forces de polices étaient postées autour de la scène et à l’entrée de l’arrière-scène.

La foule de 16 000 jeunes, principalement composée de jeunes filles et de quelques parents, a commencé à remplir la salle. A chaque fois que quelqu’un venait près de la scène, un cri s’échappait de la salle, pensant que c’était l’un des Fabulous Five. L’équipement du groupe était mis en place. La première partie, Yvonne Fair et Little Charles and the Sidewinders, ont joué, puis les Jackson Five sont apparus. Devant une foule tumultueuse et rugissante ils ont interprété leurs plus grands succès.

Sans aucun doute, à Boston, comme dans toutes les autres villes visitées par le groupe, les deux chansons préférées du public étaient I Found That Girl avec Jermaine au chant, et leur single du moment I’ll Be There, avec Michael à la barre.

Avant d’avoir pu finir leur dernière chanson et même avec le système de sécurité et la protection fournie par la hauteur de la scène (plus grande que deux hommes d’1,80 mètre), le groupe a été envahi par une foule trop zélée, et bien qu’ils aient été évacués en toute sécurité, on a appris à cette occasion qu’il serait nécessaire de renforcer le système de sécurité pour le reste de la tournée.

Un voyage dans le brouillard

Le brouillard a perturbé le trafic aérien ce soir-là dans la région de Boston, et après une rapide concertation lors de la préparation des bagages, on a pris la décision qu’au lieu de quitter Boston en avion, il était préférable d’aller jusqu’à Newark, dans le New Jersey, en limousine, pour prendre un avion jusqu’à Cincinnati, pour que les garçons puissent chanter à l’ouverture des World Series. C’était le temps fort du voyage pour tous les garçons, mais plus particulièrement pour Jackie, le baseball étant son sport favori.

Il était environ une heure du matin, le 10 octobre, quand le cortège de limousines a conduit les chanteurs endormis sur les autoroutes englouties par le brouillard le long de la Côte Atlantique, en direction de l’aéroport de Newark, où ils ont attrapé un vol pour Cincinnati. Ils sont arrivés à 9h30 du matin.

A leur arrivée à l’hôtel les jeunes hommes ont été immédiatement reconnus et emmenés dans leurs chambres. L’enregistrement devait être fait avant que les garçons aillent au lit. Ils étaient épuisés et bien qu’ils aient voulu parler avec les fans qui les attendaient dans le hall, c’était techniquement impossible parce qu’ils devaient prendre le temps de faire une sieste avant d’aller au Riverfront Stadium pour chanter l’hymne national et ouvrir les World Series 1970.

Ils sont arrivés au stade pour chanter pour un public de supporters des Cincinnati Reds et des Baltimore Orioles, mais il ne faisait aucun doute que les deux camps étaient tous des fans des Jackson Five jusqu’à ce que le groupe ait fini de chanter. Ils ont interprété La Bannière Etoiléesous le brillant ciel bleu de l’Ohio, accompagnés par le Lemon-Monroe High School Marching Band. Ils ont aussi visité le vestiaire des Cincinnati Reds et ont rencontré tous les joueurs individuellement avant le match.

Jackie, Tito et Jermaine sont restés pour assister au match, mais Michael et Marlon sont rentrés à l’hôtel pour dormir un peu, ils étaient les plus fatigués du groupe, et ils voulaient donner le meilleur d’eux-mêmes pour le spectacle de ce soir.

Sécurité renforcée

Pendant ce temps au Cincinnati Gardens, l’arène qui accueillerait le concert du samedi soir, des ouvriers écoutaient la retransmission du match à la radio en installant rapidement non seulement la scène de 5 mètres de haut qui avait été prévue dès le début, mais aussi une barricade de contremarches pour encercler la scène, pour plus de précautions. Les forces de police avaient laissé leurs radios pour établir les grandes lignes d’une stratégie qui prévoyait un cordon d’officiers autour de la barricade pour protéger les jeunes chanteurs de tout mouvement de foule.

Le concert se jouait à guichet fermé, et des milliers de jeunes ont dû être refoulés. Le plus gros des fans était resté devant le stade, mais sans billet, espérant entendre le concert de l’extérieur ou peut-être avoir un aperçu des garçons à leur arrivée ou à leur départ, causant un gros problème de sécurité.

14 000 jeunes ont eu ce pour quoi ils avaient payé à l’intérieur, et quand Jermaine a commencé à chanter I Found That Girl, des membres du service d’ordre ont commencé à évacuer jusqu’à 14 filles qui s’étaient évanouies pendant la chanson. Les allées ont été prises d’assaut et l’animateur de la soirée a dû faire un appel au calme. La standing ovation à la fin de la prestation s’est transformée en mouvement de foule et les garçons ont été évacués de la scène vers des voitures qui attendaient, avant que la foule puisse les atteindre, ce qui servirait de leçon pour le reste de la tournée.

Dans l’avion en route pour Memphis, dimanche matin, les Jackson Five ont appris que Cincinnati était la seule ville de leur itinéraire qui avait l’épouvantable réputation d’être une ville difficile pour les concerts. Même James Brown avait eu des difficultés à remplir le Gardens, alors que les billets pour le concert des Jackson Five étaient tous vendus bien avant le jour du concert.

Le concert de Memphis s’est déroulé calmement et sans incident. Les 12 000 sièges du Mid-South Coliseum étaient tous occupés, et encore une fois la foule s’était massée à l’extérieur du bâtiment pour avoir un aperçu des superstars. La police a escorté les limousines jusqu’à l’hôtel, et les jeunes hommes ont rapidement fait leurs valises pour le vol du retour à la maison.

A leur arrivée à la maison, ils ont décidé de garder les tuteurs pour les trois heures d’école quotidiennes requises par la loi, plutôt que de retourner à l’école privée, parce que la tournée allait recommencer le week-end suivant.

Le vendredi 16 octobre, le groupe reprenait la route à partir de l’aéroport international de Los Angeles, et cette fois leur destination était New York. A l’hôtel Tito a célébré son 17ème anniversaire en faisant la fête avec quelques amis, quelques membres de la famille, et quelques membres du fan club. Plus tard dans la soirée ils ont diverti 20 000 personnes au Madison Square Garden, générant le plus gros montant de la tournée, avec 122 000 dollars.

Comme à la maison

Samedi ils ont pris la direction de Detroit pour le concert le plus chaleureux. Ici dans la ville natale de la Motown, la foule était très aimante et l’atmosphère comme celle d’un retour à la maison. Le groupe savait qu’il était très important de venir à Detroit et le comportement des fans a fait qu’ils n’ont pas regretté leur décision. Le stade Olympia était rempli de 16 000 fans reconnaissants et le public enthousiaste a une fois de plus envahi la scène dans l’espoir de voir, de toucher ou de parler aux jeunes hommes.

Dimanche 18 octobre, la troupe est arrivée à Chicago, pour deux concerts, en vue de satisfaire la demande de milliers de fans, qui avaient acheté en une semaine tous les billets pour le premier concert. Après qu’un deuxième concert ait été organisé, 22 000 natifs de la « Ville des Vents » ont finalement pu voir les frères Jackson se produire lors de deux concerts ce dimanche, et ils hurlaient encore pour réclamer plus alors que l’avion des garçons quittait l’aéroport. Même les Five Stairsteps étaient dans le public pendant le concert.

Cependant les Jackson Five ne sont pas rentrés de Chicago à Los Angeles directement, car étant près de leur ville natale de Gary, ils ont profité de l’occasion pour rendre visite à des membres de la famille. La nouvelle s’est vite répandue qu’ils étaient en ville et la maison où ils se sont rendus pour quelques heures a été entourée par des fans. La rue a été inaccessible pendant plusieurs heures.

A Gary ils ont eu la chance de se rappeler des souvenirs avec leur ancien professeur de musique et ils se sont rendus à la Roosevelt High School de Gary, où Jackie et Tito étaient allés en classe. Là bas ils ont discuté avec les lycéens de leurs activités. C’était l’un des temps forts du voyage des garçons.

Quand on a fait les comptes après la fin de la tournée, le résultat a été des plus étonnants. Une fois tous les totaux réalisés, on a annoncé que les garçons avaient joué devant 100 000 personnes et rapporté 508 000 dollars, sans compter toutes les personnes qui avaient assisté au match des World Series !

De retour à Los Angeles le groupe s’est reposé et est retourné à l’école, puis a continué les répétitions pour les futurs concerts ou les apparitions à la télévision. Ils étaient de retour dans leur école privée, et soucieux des mêmes choses que leurs contemporains dans tout le pays, à savoir faire la fête, ou se poser la question de quoi faire pour Halloween.

Des lettres ont déjà commencé à arriver à SOUL à propos de la fantastique tournée des Jackson Five. Voici quelques réactions du Midwest.

Cher SOUL,
Je viens juste d’assister au concert des Jackson Five à Chicago. Ils étaient totalement et sans équivoque ensemble. La façon dont ils ont exécuté chaque pas était remarquable.
La force de Michael sur scène révèle réellement son vrai talent.
Marlon était très naturel dans sa façon de chanter et de danser.
La capacité de Jermaine à la basse était tout simplement trop.
Et la guitare de Tito a amené de la vie.
En regardant Jackie on trouve aussi qu’il brille pour la danse en comparaison de ses mauvaises capacités au chant.
Et j’espère que les Jackson Five se dépêcheront de revenir.
Garrick Dedeaux
Chicago, Illinois

Cher SOUL,
Le 16 octobre 1970 a été une soirée mémorable. J’ai vu les Jackson Five au Madison Square Garden. Le spectacle était convivial. J’ai adoré. Michael, Marlon, Jermaine, Tito, Jackie, merci pour ce grand spectacle.
J’espère que Motown fera un album live des Jackson Five au Garden.
E.C.
Bronx, New York

Cher SOUL,
Les Jackson Five ont vraiment donné un bon concert quand ils sont venus à Chicago. J’étais désolé qu’ils ne viennent que pour un soir et j’espère qu’ils reviendront vite. Où qu’ils puissent jouer, j’y serai.
Je ne peux pas oublier leurs cousins, Ronnie et Johnny, qui ont aussi joué.
A vous tous, habitants de Chicago ou de la banlieue qui avez raté ce concert, vous avez raté quelque chose.
Pat Smith
Chicago, Illinois

Cher SOUL,
Je reviens tout juste du concert des Jackson Five et je n’ai qu’un mot pour décrire ce concert: ensemble ! J’avais lu quelques témoignages mais voir c’est croire.
Michael est clairement un show à lui tout seul. J’aimerais ne l’avoir que pour moi. Toriano est venu danser. Marlon est venu danser. Jackie a jeté un petit coup d’œil et est venu se joindre à eux.
Aux Jackson Five: revenez à Detroit. Nous vous aimons.
Ometress Schuman
Detroit, Michigan

Cher SOUL,
Je suis étudiante à Chicago et j’aimerais faire un commentaire sur le concert des Jackson Five qui vient de se jouer ici devant une foule immense. J’ai eu assez de chance pour avoir les 6,50 dollars nécessaires et j’ai pris un peu de temps sur mes études pour aller voir les Jackson Five. Bien que je les aies déjà vus à Chicago avant, quand ils sont devenus aussi populaires que maintenant après avoir sorti I’m a Big Boy Now, j’avais le sentiment qu’ils seraient encore meilleurs maintenant qu’à l’époque (et ils ont été très cool déjà).
La foule regardait le début du concert avec anxiété et inattention, avec Little Charles et un autre chanteur de la Motown.
Après cette première partie, le spectacle a commencé. La foule est devenue de plus en plus tendue en attendant l’annonce de l’arrivée des Jackson Five.
Et c’est arrivé ! L’animateur a annoncé « les Jackson Five » et la foule dans son ensemble est entrée dans une totale frénésie.
Je me sens assez qualifiée pour dire que ces gars ont fait quelque chose de terrible ! Il devrait y avoir une loi contre ces artistes qui vont sur scène avec tant de finesse et qui exécutent leur performance siiiii parfaitement. Je suis de ces personnes qui vont voir un concert et qui exigent le meilleur. Je suis très critique et je peux réellement dire que je n’ai trouvé aucun défaut à ce concert des Jackson Five.
Du plus profond de mon cœur, je me sens vraiment fière et je considère comme un privilège d’être noire et de voir comment Berry Gordy a pris en main un groupe de frères noirs et d’en faire quelque chose (un phénomène) à quoi nous pouvons nous identifier.
Dieu les bénisse, qu’il y ait du succès et encore du succès pour les Jackson Five.
Linn Rodgers
Chicago, Illinois

Source: Soul Magazine / MJFrance

Traduction: Pretty Young Cat